Intéressante lettre relative à un projet de location pour un atelier situé à Paris, au 6 avenue Frochot, location dont elle n’a pas encore reçu la réponse escomptée, et cela, depuis trois semaines. « Jusqu’à présent je n’ai pu obtenir ni oui, ni non. Comme je dois déménager dans six semaines, il n’’est que temps de faire les réparations qui incombent à cette location… Je vous serai obligé, afin de savoir promptement à quoi m’en tenir… ». Ayant pu obtenir cette location et se rendant sur place, elle informe son correspondant. « J’ai été hier à l’avenue Frochot où je n’ai pas vu d’ouvriers. Je suis fort inquiète de mon entrée en possession. Voulez-vous me rassurer par un mot. Excusez mon impatience légitime… ».
Elle espère que son docteur habituel ne sera pas fâché contre elle, ayant dû se faire soigner par un confrère, sollicité par l’administration de l’opéra. « Je me suis mis dans les mains d’un Monsieur hier qui me vint de l’administration qui cette fois a bien voulu convaincre le Directeur que je ne pourrais pas chanter avant quinze jours. Je n’en ai pas moins suivi vos conseils que vous m’avez donnés et aujourd’hui je m’en trouve parfaitement, mais on m’a retenue de force au lit. Croyez donc mon cher et bon Docteur que rien d’autre ne m’a fait vous être infidèle… ».
Superbe et longue lettre en réponse à une amie, qui s’inquiétait de sa santé. Elle lui indique qu’elle a repris son « service » mais quoique mieux portante, « il y a encore une légère altération dans mon organe ». Elle lui relate ses apparitions sur scène avec ses satisfactions et ses désagréments. « Galatée a été accueillie triomphalement surtout pour les marseillais qui se jugent d’être connaisseurs… ». Elle lui avoue en revanche, sa grande déception lors de la représentation du Caïd. « J’ai joué le Caïd entouré de la manière la plus fâcheuse, Mr Tallon (Henry, 1822-1900), 1er ténor du théâtre lyrique de Paris en représentations ici, est exécrable, ne chantant pas une note de ses rôles, un mot de ses poèmes, le tout hoché de fausseté, enfin on ne lui laisse pas faire un son sans l’accompagner de chutes et de sifflets. Voilà pour le Caïd, quant à Galatée, je m’étais donné un mal tout particulier pour mettre en scène […] et voilà qu’à la première représentation, j’avais changé le Tallon par un nommé Froment qui lui, a du mérite et à fort bien dit et chanté Ganymède, mais hélas ! le baryton pris d’un enrouement terrible n’a pu ni dire ni chanter son rôle. ». Un autre évènement va compliquer la reprise de Galatée, qui était annoncée pour le surlendemain, « mais hélas la ténacité de l’enrouement ne peut permettre ce luxe, il me faut donc jouer à la place le Pré aux clercs (opéra-comique de Ferdinand Hérold) et, « pour comble de bonheur, cette pièce est un repoussoir ici tous les personnages y sont attrapés et lorsque l’on donne cet ouvrage on est sur que le théâtre fera faillite, bref, j’ai été fort applaudie tout de même, il y avait du monde et on a été très respectueux pour les camarades qui disaient le devoir à ma chère présence. ». Enfin, elle lui annonce la reprise « de Galatée » pour le lendemain, pour le vendredi suivant, « L’ambassadrice » (opéra de Daniel Auber) et pour terminer avant son retour dans ses « pénates », pour le lundi, « La Fée aux roses » (opéra de Fromental Halévy). Elle charge sa correspondante de remercier sa sœur Herminie et son mari pour la lettre reçue qui lui a fait un plaisir extrême, lettre « remplie de cœur et d’affection ».