[Société du Mercure de France] - SAMAIN, Albert ; (BAZIRGUIAN, Paul Aram ; DORGELES, Roland ; ARNYVELDE, André)
Reference : 63842
(1908)
1 vol. in12 reliure demi-maroquin à coins vert, dos à 5 nerfs, tête dorée, couvertures et dos conservés, Société du Mercure de France, Paris, 1908
Remarquable exemplaire, précédé de 4 pages manuscrites rédigées par Paul Aram Bazirguïan (1887-1971), fils du général Charles Bazirguïan. On reconnaît en garde son ex-libris gravé avec sa devise : "Mihi dedit Armenia patrem matremque Gallia. Dubium montanus lucemque Socrates". Croix de guerre 1914-1918, homme de haute culture, Paul Aram fait ici mémoire de son ami Jean Lévèque (1888-1918) : "Ce livre a appartenu à Jean Lévèque, celui de mes rares amis de collège et de jeunesse qui m'a peut-être le plus aimé, comme je l'aimais. Penser, comprendre, exprimer, étaient les trois naturelles fonctions d'un esprit dont on eût pu attendre de grandes choses si les soucis de la vie familiale, trop tôt commencée, n'avaient alourdi ses débuts dans la carrière littéraire. Marié en 1910, entraîné dans la tourmente en 1914, il est mort quelques semaine avant la Victoire, bravement, dans l'accomplissement de son rude devoir d'agent de liaison. Je devais être à quelques kilomètres d'Oulchy le Château le jour où il y tombait. J'avais tenu une place dans sa vie, j'avais été le dépositaire des souvenirs les plus chers de sa jeunesse ; il a survécu dans ma pensée et je l'ai souvent associé à mes joies et à mes peines. Ce livre de Samain était resté entre mes mains. La négligence du relieur a laissé disparaître la feuille qui portait, de la main de Jean, son nom et la courte devise sous laquelle il masquait ses brûlants enthousiasmes : "Ceterum nihil expedit". Sa voix a résonné bien souvent dans ma chambre haute de Montmorency où il venait partager mes loisirs tout entier consacrés à ce que nous adorions : la Littérature et l'Art. Mon coeur lui garde la même affection, il y ajoute l'admiration des oeuvres qu'il allait écrire si la Guerre stupide ne l'avait enlevé, à vingt huit ans". Il joint une copie de la lettre d'un soldat du 74e d'Infanterie adressée au frère de Jean et lui annonçant sa mort, une copie d'un article d'André Arnyvelde intitulé "La Veste trouée de Jean Lévèque", paru dans la "Rose Rouge" le 3 juillet 1919), et la copie d'une lettre de Roland Dorgelès, datée du 5 juillet 1934, "adressée à mon amie Cécile Lévèque, soeur de Jean, qui devint Comtesse Servier-Lécuyer, par son mariage" : "J'ai en effet eu l'occasion de parler deux fois de votre frère Jean, confrère d'avant-guerre, excellent camarade du boulevard. J'ai d'abord cité son nom dans la préface du troisième volume de l'Anthologie des écrivains morts à la guerre, puis j'ai évoqué son souvenir dans une conférence sur les "Croix de Bois" publiée dans le numéro du 5 novembre 1932 de Conferencia. L'autre soir encore, dînant avec René Blum, ancien rédacteur en chef de Gil Blas, qui connut bien Jen Lévèque, nous parlions de ce charmant ami que j'ai rencontré pour la dernière fois dans l'obscurité d'une nuit de relève...". Chroniqueur au Gil Blas et collaborateur de La Phalange, Jean Lévèque a également laissé une abondante correspondance, conservée à l'Historial de la Grande Guerre, à Péronne. Bon exemplaire bien relié (infimes frott. en dos, très bon état par ailleurs).