Strasbourg, La Nuée Bleue, 2008 in-8°, 284 pp, préface d'Angelika Tramitz, traduit de l'allemand, une carte, broché, couv. illustrée à rabats, bon état
Comment décrire l’horreur d’une guerre ? Comment faire ressortit la peur, la mort, le désespoir, la lâcheté ? Peut-être faut-il, à l’instar du soldat Dominique Richert, appartenir à la race de ces paysans-poètes qui savent la folie des hommes et l’humanité de la nature, le poids du silence et la densité de la parole. Agriculteur d’un petit village aux confins de l’Alsace et du Territoire de Belfort, Dominique Richert (1893-1977) est appelé en 1913 sous les drapeaux, loterie de l’histoire, du côté allemand. La guerre éclate, il est au front, sur tous les fronts, France, Roumanie, Pologne, Russie, jusqu’à sa désertion en 1918. Les offensives imbéciles, les retraites paniquées, les pilonnages absurdes, les officiers criminels, l’alibi patriotique, les cadavres partout, la boue, la faim, le froid, l’ennemi qu’on voit, qu’on entend et puis qu’on tue à quelques dizaines de mètres dans la tranchée d’en face. Dominique Richert est pacifiste, mais il ne se révolte jamais, il cherche à sauver sa peau sans perdre son âme. Et il observe, analyse, écrit. Son ample récit, précis comme un documentaire, impitoyable comme un réquisitoire, témoigne d’une humanité préservée au coeur de l’Europe saisie par le vertige de la guerre. Les cahiers de ce survivant ont été publiés en Allemagne à l’initiative de Heinrich Böll. Ils sont à ranger parmi les grands garde-fous de la raison, entre Roland Dorgelès et Erich Maria Remarque.