New York, Dover publications, 1958 1 vol., broché. Un grand classique, pour un des Maîtres favoris de Gracq. L'exemplaire de Julien Gracq, avec tampon.
« On peut ressentir le monde comme un carré d'hiéroglyphes d'un problème d'échecs. Il suffit de poser la pièce sur cette case que rien ne désigne pour que tout soit changé. Vu d'un certain angle, il y a là une opération absolument magique. » (in Un beau ténébreux) Louis Poirier n'était pas encore Julien Gracq lorsqu'il s'initia, vers l'âge de treize ans, aux échecs. Or, l'attrait passionné qu'il ne cessera de leurs porter s'est volontairement tenu dans la sphère de la théorie. « J'ai dû tout aux livres, et presque rien à la pratique du jeu, restée chez moi très intermittente...». Loin d'enrichir sa bibliothèque par simple manie de collectionneur, il était un lecteur « crayon en main » comme en témoignent les petites annotations en marge de ses livres consacrés aux échecs ou les feuillets manuscrits couverts d'analyses, de problèmes ou de coups joué. « Je suis un joueur médiocre, ou plutôt un lecteur de parties [...]. Cela se rattache sans doute au plaisir que je prends aux ouvrages de stratégie : j'ai du goût pour la stratégie en chambre. » Composée en majorité d'ouvrages classiques qui visent à former les joueurs d'un point de vue stratégique, à approfondir leur capacité d'analyse et à arrondir leur style, cette bibliothèque traduit des choix où ne figurent presque aucun livres « légers », de ceux qui visent à amuser l'amateur du jeu, tels que des livres sur les pièges d'ouvertures ou des anthologies de coups spectaculaires. Livres difficiles, au sens où ils requièrent du lecteur une attention très soutenue, encore appelés « livres à problèmes», ceux qui entrèrent dans sa collection exposent des positions particulières avec une consigne telle que « les blancs jouent et gagnent » et demandent au cerveau du joueur une sorte d'effort digne de l'haltérophilie, mal nécessaire pour enrichir sa capacité de calcul et d'analyse. Louis Poirier s'imposait cette discipline, assez remarquable voire exceptionnelle chez un joueur amateur. Souvent, attaquait-il des problèmes manifestement au-dessus de son niveau de jeu comme en témoignent les notes qui nous sont parvenues, présentant des solutions en majorité fausses. Tout indique qu'il notait soigneusement la solution entrevue et, évitant la tentation de vérifier la solution du livre, passait au problème suivant. « Je n'ai jamais été initié, dira-t-il, au jeu d'échecs. J'ai tâtonné dans leur direction de moi-même, sans guide, mais difficilement, obstinément je leur ai appartenu dès le début sans que j'y eusse la moindre aptitude, comme la boussole au pôle magnétique [...].» Louis Poirier commença à pratiquer le jeu des échecs vers l'âge de treize ans. Plus tard, étudiant boursier à l'Ecole normale supérieure, il voyage en compagnie de son condisciple Henri Queffelec à Budapest. Ce dernier explique comment il y avait croisé en 1931, le grand joueur d'échecs Lagos-Steiner : « Poirier le connaissait de renom. Il était déjà passionné d'échecs. il eut avec lui un long a parte. Je l'admirais du coin de l'oeil. les deux hommes n'échangeaient que des phrases très courtes, isolées par des silences au cours desquels ils ne se regardaient pas. On sentait qu'ils réfléchissaient ensemble. ils avaient mieux à faire que de s'épier. » Jeune professeur à Quimper, il participe aux tournois d'échecs de Brest, Lorient et anime le cercle d'échecs de Quimper où sera invité le grand maître Znosko-Borovsky. Au soir de sa vie, l'auteur reviendra sur son rapport particulier aux échecs : « Je me suis beaucoup intéressé au jeu d'échecs, par périodes, qui reviennent de façon quasi cyclique. Ce sont des périodes où je n'écris pas. » (Réf. Revue 303, n° 93, Gracq ; Gracq. Lettrines 2.) Bel exemplaire. Un exemplaire du catalogue présentant la totalité de ses ouvrages sur les échecs est offert pour tout achat. Il est également disponible contre 20 € (tirage limité à 200 exemplaires).