Précieux exemplaire relié aux armes et au chiffre de Henri-Jacques-Nompar de Caumont. Paris, Guillaume Le Noir, 1587. [A la suite :] Paris, Guillaume Le Noir, 1586. In-4 de : I/ (1) f.bl., (4) ff. pour le titre, l’épitre et la table, 128 ff. ; II/ (8) ff. pour le titre ; l’avant-propos et la table, 40 ff., (1) f.bl. Restauration à l’angle inférieur droit du premier feuillet. Relié en plein veau marbré de la fin du XVIIe siècle, armes dorées frappées au centre des plats, dos à nerfs orné d’un chiffre couronné répété dans les caissons, pièce de titre en maroquin rouge, coupes décorées, tranches mouchetées. 225 x 150 mm.
I/ Intéressante étude généalogique menée au XVIe siècle par l’historien grec Étienne de Chypre sur les origines de sa famille. Brunet, III, 1239. Etienne de Lusignan, qui ne cache pas son mépris pour les légendes relatives à l’origine de sa famille, propose d’en trouver la source bien avant Mélusine, qu’il ne situe qu’à la onzième génération. « Le mot « généalogiste » apparaît dans la langue française au milieu du XVIIe et pas moins de 130 généalogies, légendaires et historiques ont été publiées, selon Lenglet de Fresnoy, durant la première modernité en France… La noblesse apprécie ces généalogies qui entretiennent le culte de la lignée, au même titre que l’héraldique. Cet usage massif mais ambivalent de la recherche des ancêtres a conduit les historiens à en rechercher la signification. On a longtemps vu dans cet engouement généalogique une crise de la noblesse, matérielle et identitaire, aujourd’hui fort contestée. Concurrencée par la montée des officiers, discréditée lors des guerres de religion, incapable enfin d’apparaître comme détentrice de la vertu, la grande noblesse opérerait avec le concours de la monarchie un blocage social en se repliant sur son sang… Comme le souligne le dominicain Étienne de Chypre, la fonction de ces généalogies pour les familles est de ‘se montrer presque avoir été de toute éternité’. » (J.-M. Le Gall, Vieux saint et grande noblesse à l’époque moderne : Saint-Denis, les Montmorency et les Guise, Revue d’histoire moderne et contemporaine). Les Lusignan étaient une dynastie féodale du Poitou, peut-être apparentée à celle des Lusignan de l'Agenais, rendue célèbre par la légende de Mélusine. On en connaît mal l'origine, et la suite n'en est sûre qu'à dater du Xe siècle (vers 967). On cite : Hugues IV, dit le Brun (jusque vers 1030); Hugues V, tué traîtreusement en 1080; Hugues VI, dit le Diable, qui prend part à la première croisade Hugues VII, qui suit Louis VII en Orient; enfin Hugues VIII, duquel descendent, d'une part, les comtes de la Marche et d'Angoulême; d'autre part, les rois de Chypre et de Jérusalem et, par ces derniers, les Lusignan de la Petite-Arménie. L’épitre dédicatoire du présent ouvrage est adressée à François de Luxembourg, Duc de Piney. Le premier texte est illustré au verso de la table d’un beau bois gravé à pleine page représentant Mélusine portant les blasons des Lusignan rois de Jérusalem, Chypre et Arménie et des Luxembourg empereurs rois de Bohême et Hongrie. « Le chapitre XXVIII traite « Du nom de Lusignan ». Le père de Lusignan a rencontré le défunt Postel qui lui a proposé du nom de sa famille une étymologie qu’il considère d’un œil critique. ‘Le divisant en ces deux mots Lusi gnan : et que Lusi signifiait dessus, et gnan, amandier, comme si eusté à dire ‘dessus l’amandier’ ; et pour ce que l’amandier est communément haut de nature, et le premier des arbres qui porte fleur, et ce qui est par-dessus, a ceste occasion se peut dire avoir la domination sur les choses les plus hautes, ainsi il disait que ce mot Lusignan signifiait superintendant et quasi supérieur à toutes choses’. Aux objections du Père de Lusignan qu’il n’y eût jamais de Juifs autrefois en Poitou, Postel répond que les Juifs furent très tôt dispersés et que les Poictevin, Goths, Vandales, Huns, … sont sortis des Scythes septentrionaux, issus des dix tribus d’Israel. » (Gaignebet, A plus hault sens, p. 456).II/ Rare édition originale du second texte, dans lequel Lusignan énumère les divers prétendants au titre, à la couronne et à la possession du royaume de Jérusalem. « Etienne de Lusignan est un historien grec né en 1537 à Nicosie (île de Chypre), mort en 1590. Il entra dans l’ordre de Saint-Dominique, et changea alors son nom de baptême Jacques contre celui d’Etienne. En 1570 il vint à Rome, et l’île de Chypre ayant été envahie par les Turcs l’année suivante, il séjourna quelque temps à Naples, d’où il vint en 1577 à Paris. Il demeura dix ans dans cette ville. Le 27 avril 1578 le pape Sixte-Quint le fit évêque titulaire de Limisso. » (Biographie générale, 31, 278). Précieux exemplaire relié aux armes et au chiffre de Henri-Jacques-Nompar de Caumont, duc de la Force, pair de France, né le 5 mars 1675, mort le 22 juillet 1726. « Il fut enlevé à ses parents qui étaient protestants pour être élevé au collège des Jésuites ; il devint même un fougueux persécuteur des réformés en Saintonge et en Guyenne, lorsqu’il eut été nommé colonel d’un régiment ; à la mort de son père, survenue en 1699, le duc de Caumont hérita du titre de duc de la Force et de la dignité de pair de France ; reçu membre de l’Académie française le 18 janvier 1715, nommé vice-président du conseil des finances en 1716, puis membre du conseil des régences, il favorisa l’adoption du système de Law. Il mourut le 21 juillet 1726. Il avait épousé Anne-Marie de Beuzelin de Bosmelet le 18 juin 1698, dont il n’eut pas d’enfant ». (Olivier, planche 1726 ; Guigard, Armorial du Bibliophile, 120-121).