Paris, Chancerel éditions, 1975; in-12 oblong, 96 pp., cartonnage de l'éditeur. Très bon état - dessins de Gary Keane.
Très bon état - dessins de Gary Keane.
CRDP.Toulouse en 1982.In-8 broché.48 p.Préface de L.Martin,Maire de Montespan.Illustrations et plans.Etat correct.Mouillure en page de garde.Couverture un peu usagée.
Exceptionnel script original du premier film de Romain Gary. Il s'agit de son propre exemplaire, annoté et enrichi continuellement en cours de tournage. On y joint des photographies du film. S.l.n.d. [Paris, Huelva, Boulogne, 1967]. 1 tapuscrit (205 x 265 mm) de 241 f. chiffrés de 2 à 219. Broché, sous couverture rose imprimée. Exceptionnel script original du premier film de Romain Gary. Il s'agit de son propre exemplaire, annoté et enrichi continuellement en cours de tournage.
La dactylographie comporte sur la couverture les mentions autographes : « Exemplaire auteur Romain Gary » ainsi que d’autres annotations ; s’y ajoutent une petite centaine de corrections avec, sur une vingtaine de feuillets, des collages des versions corrigées où l’on distingue, par transparence, les passages autographes modifiant le texte, tel qu’il sera donné par les acteurs du film et selon les découpages voulus par Gary. Au printemps 1967, Gary fomente un nouveau projet : devenir lui-même réalisateur « alors qu’il a toujours été déçu en voyant ses propres [livres] portés à l’écran […]. Adapter une de ses œuvres, devenir réalisateur, faire tourner Jean… trois désirs entremêlés qu’il va mettre en pratique » (Kerwin Spire, Monsieur Romain Gary, écrivain-réalisateur, p. 142). Ses romans étant bien trop importants pour être rapidement adaptés, Gary se tourne vers un recueil publié en 1962 : Gloire à nos illustres pionniers. Le livre se compose de seize nouvelles, parmi lesquelles plusieurs ont déjà fait l’objet d’une publication dans des revues ou journaux, en France ou aux États-Unis. L’une des nouvelles, « Birds in Peru », est publiée en mars par PlayBoy Magazine : elle est consacrée « best fiction of the year ». C’est cette nouvelle que Gary choisit pour servir de base au scénario du film qu’il projette : du cousu main pour Jean Seberg, dans le rôle d’une jeune femme nymphomane, mais frigide. L’affaire est rapidement conclue avec les studios Universal Pictures. Gary sera à la réalisation, assisté de Michel Wyn. « J’aurais pu me contenter de reprendre ma nouvelle pour en tirer un scénario et confier la réalisation à quelqu’un d’autre. Mais ce serait me fier à un inconnu, à une autre vision […]. J’ai beaucoup traîné sur les plateaux de cinéma et j’ai déjà écrit plusieurs scénarios mais j’ai besoin de quelqu’un pour la technique cinématographique », explique-t-il à Michel Wyn. Quant à cet étrange titre, Gary s’en explique : « J’ai observé, non loin de Lima, une plage où les oiseaux, chassés des îles voisines par le froid, viennent expirer sur le sable chaud. Cette anecdote m’a inspiré une intrigue : une jeune femme a un rendez-vous sur cette plage où elle vient chercher la mort […]. Chaque matin pendant les deux mois de l’été 1967, l’assistant metteur en scène va se rendre rue du Bac pour travailler sur le scénario et accoucher les idées que Romain Gary a à l’esprit » (Spire). « Les oiseaux vont mourir au Pérou ne fut pas un four (au contraire, donc, de ce que ne cessent de prétendre, bien hâtivement, les biographes de Romain Gary ou de Jean Seberg), mais l’un des 25 plus grands succès de l’année 1968 en termes d’entrées dans les cinémas parisiens, et il fut diffusé dans plus de vingt pays à travers le monde. Le film a aujourd’hui la réputation d’avoir été unanimement éreinté par une critique féroce, à sa sortie. Mais la vérité est ailleurs, car il n’a pas fait que déplaire, il a aussi convaincu. Ainsi par exemple, en France, Michelle Delcombre : ‘Beauté un peu quintessenciée, un peu mallarméenne, mais indéniable. On ne saurait contester que Gary voit en termes de cinéma.’ (Liberté, n° 152, 1er octobre 1968, p. 6). Ainsi par exemple aux Pays-Bas, J.C.A. Fortuin : ‘Il serait exagéré d’en parler comme d’un chef-d’œuvre, mais pour un début, ce film est assurément magistral’ (De Tijd, 25 octobre 1968, p. 15). Ainsi également en Angleterre : pour Jan Dawson, s’exprimant en 1971, ce premier film de Gary est l’un des dix meilleurs films de toute l’histoire du cinéma (cf. l’enquête du mensuel anglais Sight and Sound, vol. 41, n° 1, déc. 1971, p. 14). Ce ne sont là que trois exemples internationaux parmi d’autres. Régulièrement, dans des interviews pour la presse dans les années 1970, et dans son autobiographie La nuit sera calme (1974), Romain Gary a évoqué ce film avec affection, et l’a cité en exemple, voire en éclairage, de sa manière d’artiste de mêler, aux histoires qu’il invente, des allégories mythologiques. Quelques mois avant sa mort, dans une interview donnée au début de l’année 1980, il soulignait encore l’importance que son premier film revêtait à ses yeux : ‘[c’est] une des choses dont je suis le plus fier de ma vie.’ (cf. l’émission de Jean Faucher ‘Propos et confidences’ de Radio Canada, filmée chez Romain Gary au début de l’année 1980, diffusée en janvier-février 1982 ; transcription dans Romain Gary, Le Sens de ma vie, Paris, Gallimard, 2014, p. 88). » (Jean-François Hangouët, Note sur Les oiseaux vont mourir au Pérou, 2024). Joints : • Les deux numéros de Playboy où paraissent la nouvelle (en 1964 et 1973) ; • Plusieurs photographies en tirage d’époque, sur le tournage : Gary et Seberg, entre deux prises (cliché de plateau, Universal Pictures) ; Gary, Brasseur et Ronet, sur la plage à Huelva ; Maurice Ronet et Jean Seberg, pour plusieurs scènes sur la page ; plusieurs portraits de plateau de Jean Seberg, Maurice Ronet, Jean-Pierre Kalfon et Pierre Brasseur ensemble ; Gary et Danielle Darrieux… Une photographie montre Jean Seberg, au repos entre deux scènes, à Huelva : on y aperçoit clairement la boîte des cigares Montecristo posée sur la veste de Gary, et surtout le script de ce dernier – celui proposé ici et qui l’accompagna tout au long de ces deux mois de tournage.
Édition originale. Un des 200 premiers exemplaires sur Outhenin-Chalandre. Le premier livre de Romain Gary en français, six mois après sa parution originale en anglais, à Londres. Cette édition sera récompensée par le Prix des Critiques en septembre et marque l'entrée de Gary en littérature. Paris, Calmann-Lévy, (juin) 1945. 1 vol. (120 x 185 mm) de 178 p., [1] et 1 f. Broché, non coupé, sous coffret. Édition originale. Un des 200 premiers exemplaires sur Outhenin-Chalandre (n° 86). Le premier livre de Romain Gary en français, six mois après sa parution originale en anglais, à Londres. Jointe, magnifique lettre autographe à Maurice Nadeau, le remerciant pour la longue chronique qu’il a consacrée à Éducation européenne.
Gary y annonce son « nouveau livre » [Tulipe qui sera publié par Calmann-Lévy en juin 1946], évoquant également Albert Camus. Les deux hommes ne se connaissent pas encore mais Camus - peut-être grâce à Nadeau - lira Éducation européenne. Ce sera le début d'une relation littéraire et amicale forte entre les deux hommes. Pour l'heure, c'est un Romain Gary ému et reconnaissant qui s'adresse à Maurice Nadeau : « Cher Monsieur, Je m'excuse du retard considérable que j'ai mis à répondre à votre lettre et à vous remercier, aussi, de l'article si généreux que vous avez bien voulu consacrer à Éducation européenne dans Combat. Je pense que la façon la plus sûre, la seule façon de vous remercier, est de justifier, par mon nouveau livre, la confiance que vous semblez mettre en moi. Ce livre est sur le point d'être terminé, mais si je ne puis, pour le moment, vous donner un extrait à publier, pour la raison suivante : j'ai plus ou moins promis ce manuscrit à une revue dont le titre m'échappe. Je crois que c'est Les Temps nouveaux ou Les Temps modernes ou quelque chose comme ça - dont le directeur futur, M. Sartre, m'a assez longuement parlé à mon avant-dernier passage à Paris. Si cette revue ne se matérialise pas ou s'il apparaît contrairement à ce qu'il me paraît, que je n'ai fait aucune promesse à personne et en particulier pas à M. Sartre, je serais très heureux de vous soumettre mon nouveau livre pour que vous puissiez y choisir un bon morceau. Je m'excuse d'entrer dans ces détails idiots, mais la vérité est que je ne sais plus très bien ce que j'ai promis et ce que je n'ai pas promis et à qui. Je crois que Albert Camus pourrait vous expliquer ma situation un peu compliquée ; je sais que vous le connaissez. Je m'excuse d'ailleurs de vous importuner avec ces détails ridicules. En attendant, je ne puis que répéter encore une fois ceci : je ferais de mon mieux pour justifier la confiance que vous avez mis en moi. Romain Gary. » Cette lettre marque l'entrée officielle de Gary en littérature, sous le haut parrainage de Maurice Nadeau qui lui consacrera rien de moins que quatre articles. Dans Combat - dirigé par Camus -, Nadeau souligne que « s'il ne fait pas de doute que demain le nom de Romain Gary et de son roman Éducation européenne soient sur toutes les lèvres, c'est qu'il n'a pas écrit un roman de résistance, mais ‘le' roman de la Résistance, ou plus exactement, puisque ce vocable a déjà pris un sens étroit, il a écrit l'histoire de la lutte des peuples opprimés d'Europe sous la schlague fasciste, et ce, en un ouvrage qui ne compte pas deux cents pages, ce qui montre en passant qu'une fresque de cette ampleur et de cette importance n'a pas besoin des eaux du roman-fleuve bavard tout juste propres à l'y noyer ». Gary, ahuri par le succès, s'en émeut dès le début du mois d'août auprès de Raymond Aron, son premier lecteur et celui par qui beaucoup était arrivé : « Qu'est-ce qui se passe ? Je reçois des lettres ahurissantes d'Albert Camus, la lettre la plus belle, la plus émouvante que vous pouvez imaginer de Roger Martin du Gard ainsi que des épîtres absolument invraisemblables de quatre ou cinq types qui se disent écrivains et qui ont tous des revues » (Lettre de Romain Gary à Raymond Aron, datée du 8 août 1945, conservée dans les archives personnelles de Raymond Aron, citée par Olivier Gariguel). Écrit pendant la guerre que Romain Gary mena au sein du groupe de résistance « Lorraine », ce premier roman, d'abord publié en anglais à la fin de 1944, fit du jour au lendemain la gloire de son auteur. Ce dernier est encore à son poste de capitaine de l'état-major de Londres quand le roman, devenu L'Éducation européenne, paraît en France ; le choix du titre revenait à Pierre Calmann : « Le titre que je préfère pour votre ouvrage est : L'Éducation européenne. Je trouve que les autres sont nettement moins bons ». La version française est retravaillée entre novembre 1944 et mars 1945, et le texte, considérablement remanié : « la dépolonisation et l'Européanisation seront les deux mamelles de la gloire de Romain Gary [...] toutes les mentions de la libération de la Pologne sont supprimées dans la version française pour être remplacées par des invocations toutes nouvelles de l'Europe. Le français ayant une vocation plus universaliste que la langue polonaise, c'est en français désormais que le partisan ‘européen' Adam Dobranski, qui perd son accent, écrira son poème » (David Bellos, Le Malentendu, L'histoire cachée d'Éducation européenne, Cahiers de l'Herne). Le livre, dédié à un jeune compagnon du groupe Lorraine, Robert Colnacap, paraît au début de l'été 1945. Naissance d'un écrivain, qui obtient le Prix des Critiques le 7 novembre 1945. Magnifique exemplaire.
Première édition américaine. Premier tirage, avec mention de « first edition ». Rare exemplaire en premier tirage d'un des chefs-d'oeuvre de Gary. New York, Harper & Brothers, (octobre) 1961. 1 vol. (150 x 220 mm) de 337 p., [2] et 2 f. Cartonnage éditeur, jaquette illustrée. Première édition américaine. Premier tirage, avec mention de « first edition ».
La traduction est donnée par un certain John Markham Beach : c'est un pseudonyme créé par Romain Gary. Cette édition est en partie originale et contient un long chapitre - le XXII - qui ne figure pas dans l'édition française, publiée à Paris l'année précédente. Il est entièrement consacré à sa mère et à la figure de M. Zaremba, un riche client de la pension familiale à Nice : un artiste peintre polonais qui demande à Romain la permission de demander la main de sa mère. Elle repousse catégoriquement le prétendant, toujours par l'intermédiaire du jeune garçon, factotum chargé de transmettre le message et son refus. Gary, après avoir vainement essayé de convaincre sa mère du bien-fondé de la demande de son futur-ex-beau-père adoptif, prend conscience, pour la première fois, d'une réelle différence de vue avec sa mère, qu'il finit par comprendre : « jamais je ne comprendrai comment j'avais pu, même à dix-sept ans, me montrer aussi ignorant de la féminité ». Pourquoi cet ajout ? « En écrivant dans une langue autre, il semble que Roman Gary se soit senti plus libre. Adresser des reproches à sa mère dans une langue autre que sa langue maternelle - langue choisie par la mère et non donnée, se déplacer dans un autre univers culturel ouvre une possibilité de dire autrement, ailleurs, ce qui n'a pas été entendu chez soi. Pour l'écrivain, cela permet aussi de réagir à chaud à la réception critique dans la langue originale d'écriture. L'étanchéité des mondes culturels français et américain de l'époque est une évidence pour Gary, et d'ailleurs, aucun critique dans les articles français consacrés à Lady L., Les Mangeurs d'étoiles, Adieu Gary Cooper ou Charge d'âme ne fait allusion à l'existence de ces livres dans leurs versions originales anglaises » (Romain Gary, l'impossible dérobade, par Benoit Desmarais). À la demande de Gary, ce chapitre sera intégré dans la version française en 1980, traduit par Gary lui-même, telle une dernière volonté. Le livre, dans cette édition définitive, est sous presse lorsque Gary se suicide, le 2 décembre 1980. Rare exemplaire en premier tirage d'un des chefs-d'oeuvre de Gary. Bel exemplaire, dans une jaquette en excellente condition.
Première édition américaine. Premier tirage, avec mention de « first edition ». Rare exemplaire en premier tirage d'un des chefs-d'oeuvre de Gary, qui présente un texte plus complet que l'édition française. New York, Harper & Brothers, (octobre) 1961. 1 vol. (150 x 220 mm) de 337 p., [2] et 2 f. Cartonnage éditeur, jaquette illustrée. Première édition américaine. Premier tirage, avec mention de « first edition ».
La traduction est donnée par un certain John Markham Beach : c'est un pseudonyme créé par Romain Gary. Cette édition est en partie originale et contient un long chapitre - le XXII - qui ne figure pas dans l'édition française, publiée à Paris l'année précédente. Il est entièrement consacré à sa mère et à la figure de M. Zaremba, un riche client de la pension familiale à Nice : un artiste peintre polonais qui demande à Romain la permission de demander la main de sa mère. Elle repousse catégoriquement le prétendant, toujours par l'intermédiaire du jeune garçon, factotum chargé de transmettre le message et son refus. Gary, après avoir vainement essayé de convaincre sa mère du bien-fondé de la demande de son futur-ex-beau-père adoptif, prend conscience, pour la première fois, d'une réelle différence de vue avec sa mère, qu'il finit par comprendre : « jamais je ne comprendrai comment j'avais pu, même à dix-sept ans, me montrer aussi ignorant de la féminité ». Pourquoi cet ajout ? « En écrivant dans une langue autre, il semble que Roman Gary se soit senti plus libre. Adresser des reproches à sa mère dans une langue autre que sa langue maternelle - langue choisie par la mère et non donnée, se déplacer dans un autre univers culturel ouvre une possibilité de dire autrement, ailleurs, ce qui n'a pas été entendu chez soi. Pour l'écrivain, cela permet aussi de réagir à chaud à la réception critique dans la langue originale d'écriture. L'étanchéité des mondes culturels français et américain de l'époque est une évidence pour Gary, et d'ailleurs, aucun critique dans les articles français consacrés à Lady L., Les Mangeurs d'étoiles, Adieu Gary Cooper ou Charge d'âme ne fait allusion à l'existence de ces livres dans leurs versions originales anglaises » (Romain Gary, l'impossible dérobade, par Benoit Desmarais). À la demande de Gary, ce chapitre sera intégré dans la version française en 1980, traduit par Gary lui-même, telle une dernière volonté. Le livre, dans cette édition définitive, est sous presse lorsque Gary se suicide, le 2 décembre 1980. Rare exemplaire en premier tirage d'un des chefs-d'oeuvre de Gary. Bon exemplaire.
Édition originale. Un des 65 premiers exemplaires sur vergé d'Arches. Bel exemplaire broché. Paris, Mercure de France, (15 novembre) 1976. 1 vol. (170 x 260 mm) de 213 p. et [3] f. Broché, non coupé. Édition originale. Un des 65 premiers exemplaires sur vergé d'Arches, celui-ci 1/10 hors commerce de tête (n° 3).
Le titre sonne comme un pied de nez à la lueur de la révélation de ce qui fut certainement la plus grande supercherie de l’histoire littéraire – Romain Gary n’en reconnaît qu’une d’égale ampleur, celle de Macpherson inventant le poète Ossian. Las de la « gueule » qu’on lui faisait depuis trente ans, Gary revient au monde sous le nom d’Émile Ajar. « C’était une nouvelle naissance. Je recommençais. Tout m’était donné encore une fois. » Après le succès de Gros Câlin, premier des Ajar, Gary perfectionne son stratagème pour la sortie de Pseudo, écrit en quinze jours, en donnant un visage à son double. Ce sera son cousin Paul Pavlowitch qui incarnera l’écrivain. Gary s’amusera que personne ne le reconnaît derrière ses textes, que les critiques qui encensaient Gary descendent Ajar en flamme et inversement. Et à ceux qui reprochait à Pseudo d’être un livre « vomi » d’où toute « rouerie » était absente, Gary répondra : « S’il est un livre de vieux professionnel, c’est bien Pseudo : la rouerie consistait à ne pas la laisser sentir. Car il se trouve que ce roman de l’angoisse, de la panique d’un être jeune face à la vie devant lui, je l’écrivais depuis l’âge de vingt ans, l’abandonnant et le recommençant sans cesse, traînant des pages avec moi à travers guerres, vents, marées et continents, de la toute jeunesse à l’âge mûr... » Écrit en quinze jours en 1976 par un Gary claquemuré dans un studio à Genève, Pseudo se présente comme le récit furieux, impulsif et brutal destiné à clore le bec de tous ceux qui spéculent sur la véritable identité d’Émile Ajar : « Mais qui est donc cet Ajar ? » se demande le Tout-Paris. « Mon neveu Paul Pavlowitch », répond Gary, bien décidé à pousser jusqu’au bout la supercherie. Avec Pseudo, Gary reconstruit pièce à pièce toute la défense Ajar, avec la maîtrise implacable des pires machinations. Dans cette autobiographie du supposé Pavlowitch, Gary atteint son but : mettre fin aux rumeurs, duper la presse et régler un certain nombre de comptes avec… lui-même, où l’imposture poussée à son comble a pour effet de produire de l’authentique : « J’ai inventé de toutes pièces un Paul Pavlowitch dans le roman. Un délirant. J’ai voulu exprimer l’angoisse et je t’ai chargé de cette angoisse. Je règle aussi des comptes avec moi-même – plus exactement, avec la légende qu’on m’a collée sur le dos. »
Script d'auteur et version finale avant l'impression du scénario définitif, avec corrections autographes. Le scénario et les découpages techniques sont entièrement écrits par Romain Gary. L'exemplaire de de Romain Gary, enrichi de diverses photographies du film. [Paris, novembre-décembre 1970]. 1 script (215 x 275 mm) de 150 f., chiffrés 1 à 148. En feuilles. Script d’auteur et version finale avant l’impression du scénario définitif. Le scénario et les découpages techniques sont entièrement écrits par Romain Gary. Ce jeu est le sien, comme en témoigne la trentaine de corrections autographes qui jalonnent le document. Il provient par ailleurs du fonds Gary cédé au Musée des lettres et manuscrits de feu Aristophil. On retrouve sa trace lors de la vente Artcurial (Paris, 2020, lot 446) qui a dispersé l’ensemble des livres et manuscrits de cet ensemble.
On ignore le nombre d'exemplaires qui a été fait de ce screenplay, rédigé tout en anglais - la faute à une production internationale, sous la gouverne d'Alexander Salkind, un producteur franco-mexicain d'origine russe qui connaîtra gloire et fortune six ans plus tard en produisant les trois volets de Superman. Pour l'heure, ce sont James Mason, Stephen Boyd, Curd Jurgens, Jean Seberg et Henri Garcin qui sont convoqués et à qui l'on va demander des supers-pouvoirs pour faire du film une réussite. La (mince) trame ? Une jeune femme, Emily (Jean Seberg), jeune épouse d'un haut fonctionnaire d'Interpol, est perdue à des kilomètres de toute civilisation, qui doit son salut à l'intervention de Killian (Stephen Boyd), un homme prêt à tout pour réduire à néant un gang de trafiquants de drogue. Une véritable guerre dans laquelle il implique Emily, propulsée malgré elle dans un monde de violence et de corruption qui lui fera comprendre que son mari n'est pas vraiment le policier incorruptible qu'il semblait être... Le film fut tourné au cours de l'hiver 1971, dans deux villes d'Espagne, Madrid et Alicante. Romain Gary est aux commandes, avec Jean Seberg en vedette. La première eut lieu à Marseille le 19 janvier 1972. Il sortira en salle également sous les titres de Police Magnum et aux États-Unis Kill kill kill. Disons-le clairement, le film n'est pas un chef-d'oeuvre, très loin de Les oiseaux vont mourir au Pérou. La critique n'est pas tendre avec Gary : « Le problème de la drogue est un problème grave et Romain Gary un homme sérieux. Que ce romancier de talent, ancien diplomate, journaliste et cinéaste à ses heures (Les oiseaux vont mourir au Pérou), ait entrepris de dénoncer à l'écran les responsables du plus ignoble des trafics nous paraissait de bon augure [...]. Mais [tant] de scènes érotico-exotiques, de poursuites motorisées, de mitraillages en série ravalent Kill au niveau des sous-produits du genre. Méli-mélo de poncifs, d'une confusion extrême, où se noie le réquisitoire annoncé et attendu » (Le Monde). Romain Gary, dans une interview donnée au même moment, tente de convaincre : « j'ai besoin de faire partager le dégoût que m'inspire la drogue et ses trafiquants. La première chose à faire est de donner aux gens le dégoût le plus total [...]. Donner une notion d'infamie. Pour moi, ce sont des nazis. Il faut que le public rie de leurs cadavres [...]. Sur le plan international, il n'y a pas de lutte d'action. Les gouvernements ne font pas ce qu'il faut pour produire des pressions légitimes sur les pays producteurs, par peur de perdre de clients sur d'autres pans économiques ». L'intention est louable, mais le résultat, d'un point de vue cinématographique, loin d'être convaincant. Le film fait un flop. « Romain mon amour, [...] Quand tu as réalisé le film, avec si peu d'aide de qui que ce soit autour de toi, c'était en partie dans le but de sauver ma vie. Au sens propre du terme. Personne - et surtout moi - ne pensait que je serais même capable de travailler à nouveau, que je serais à même de trouver les ressources psychiques et la force physique. Et tu savais que c'était une question de survie pour moi de trouver la discipline et la force de travailler à nouveau. » Jean Seberg écrit cette lettre après la sortie du film, après que Gary eut en effet tenté de lui donner une raison de se lever et de vivre. Le film n'arrangera rien, bien au contraire, et le couple divorcera l'année suivante.
Édition originale. Exemplaire poinçonné du service de presse. Belle réunion deux premiers volumes de Frère Océan, en service de presse et ex-libris de Maurice Druon. Paris, Gallimard, (27 septembre) 1965 et (11 mai) 1967. 2 vol. (140 x 205 mm) de 476 p., [1] et 1 f. ; 276 p. et [2] f. Brochés. Édition originale. Exemplaires poinçonnés du service de presse. Exemplaires de Maurice Druon.
L’amitié et le respect mutuel de Romain Gary avec Joseph Kessel pouvait difficilement faire autrement que de rendre possible une rencontre entre Gary et Maurice Druon. La bibliothèque de ce dernier contenait une partie des titres publiés par Gary entre 1965 – Pour Sganarelle formant le premier d’entre eux – jusqu’en 1977, avec Clair de femme. Il n’est pas anodin que le plus ancien livre de Gary soit ce Pour Sganarelle, c’est-à-dire un essai plus qu’un roman. « Contre le pré carré du Je, Pour Sganarelle annonce, dans l’ivresse, le dérèglement radical de toutes les identités qui n’a fait que croître jusque-là dans les textes de Gary et qui donnera ensuite naissance à La Danse de Gengis Cohn, La Tête coupable et Europa. Pour Gary, la posture de Sartre et de Robbe-Grillet va à l’encontre de ce qu’est réellement le roman, le faisant verser dans l’hypocrisie et une mauvaise foi toute traditionnelle qui n’a rien de celle, motrice et vitale, qu’il cultive chez ses personnages. Leur défense ‘de l’honnêteté et de l’intégrité du romancier’ n’est qu’une ‘pitrerie’, un ‘charlatanisme littéraire’, une ‘escroquerie littéraire’, une ‘infâme tartufferie’ (p. 39). Les thuriféraires de l’honnêteté sont en réalité des faux-monnayeurs. Gary « a trop le goût de l’imposture romanesque pour ne pas s’occuper de cette autre imposture qui s’effectue sous couvert de l’honnêteté intellectuelle » (Maxime Decout, « Des faux papiers en règle. À propos de Gary-Ajar », Raison présente, 2018/4, n° 208), p. 103-114). Belle réunion deux premiers volumes de Frère Océan, en service de presse et ex-libris de Maurice Druon.
Edition originale. Un des 60 exemplaires réservés au « Club de l'édition originale » sur pur fil. Envoi signé. Rare dans ce tirage et avec envoi. Paris, Gallimard, (24 juin) 1966. 1 vol. (145 x 205 mm) de 328 p. et [4] f. Broché. Edition originale. Un des 60 exemplaires réservés au « Club de l’édition originale » sur pur fil (n° 24). Envoi signé : « à tous [Les mangeurs d'étoiles], hommage de Romain Gary ».
« Les mangeurs d’étoiles », ce surnom donné aux Amérindiens de l’hémisphère sud consommant des plantes hallucinogènes, Gary l’applique aux personnes qui poursuivent un rêve : ici, l’irrésistible ascension et la chute d’un Indien cujon, Al Mayo, dictateur d’une république caribéenne, en quête d’un pacte avec le diable. Une transposition moderne du Faust de Goethe où les États-Unis jouent le rôle de Méphistophélès. Gary est particulièrement bien placé pour cela : le cadre géographique du roman lui est fourni lorsqu’il est nommé consul général de France à Los Angeles en 1961. Chargé d’une mission de remplacement, il prend trois mois durant la gérance de l’ambassade de France à La Paz, en Bolivie - il n’y avait plus d’ambassadeur depuis six mois et « cette vacance indisposait le dictateur du moment » (Myriam Anissimov, Romain Gary le caméléon, Denoël, 2004, p. 284). Il s’imprègne alors de cette atmosphère sud-américaine, à l’origine de deux nouvelles : « Les oiseaux vont mourir au Pérou » et « La plus vieille histoire du monde ». Ce sera le cadre de son roman, qui a alors pour titre Le Mangeur d’étoiles sous lequel il le recense encore parmi ses œuvres dans le premier chapitre de Pour Sganarelle (1965). Dans une interview donnée à Pierre Desgraupes le 2 novembre 1966, Gary développe tout ce qu’il cherchait à y montrer ; et synthétise ainsi : « Goethe a franchement menti. La véritable tragédie de Faust ce n’est pas qu’il ait vendu son âme au Diable, c’est qu’il n’y a pas de Diable pour vous l’acheter. » Le titre forme le premier volet de La Comédie américaine, complétée en 1969 par Adieu Gary Cooper : l’un et l’autre avaient d’abord été publiés en anglais : sous les titres The Talent Scout en 1961 pour le premier et The Ski Bum en 1965 pour le second. Comme Lady L. trois ans auparavant, la traduction française a été établie par Jean Rosenthal avec le concours de l’auteur. Lorsque le roman est publié à Londres en 1961, il est présenté comme une traduction d’un certain John Markham Beach, qui se serait aussi chargé de la transposition en anglais de La Promesse de l’aube (Promise at Dawn). Un pseudonyme de plus à l’actif de Gary ! Bel exemplaire. Rare avec envoi sur un grand papier.
Édition originale et premier tirage (pas de grands papiers). Elle est anonyme, sans mentionner l'identité de Gary, révélée quelques semaines plus tard.Rare premier tirage - la couverture étant par la suite modifiée. Paris, Gallimard, (3 mai) 1974. 1 vol. (150 x 220 mm) de 289 p. et [1] f. Broché, sous couverture illustrée. Édition originale et premier tirage (pas de grands papiers).
Gary affabule et frelate avec malice le monde des Lettres dans une mystification à grande échelle : un avant-goût de la naissance d’Émile Ajar. Avec Les Têtes de Stéphanie, Gary ne se contente pas d’attribuer une œuvre à un faux auteur et invente bel et bien un écrivain complet avec un univers à part entière, important le mensonge de la fiction dans le réel : il crée à cette fin Shatan Bogat, et sa sulfureuse biographie : caché en Inde, ce journaliste américain aurait dénoncé le trafic d’armes dans un précédent roman, Seven Years in Fire. Qui aurait été couronné du prix Dakkan. Personne n’ira vérifier que n’existent ni le texte ni le prix. Pour accréditer la supercherie, le manuscrit est livré en anglais aux Éditions Gallimard, qui en donne une traduction. Or, Shatan Bogat est un individu exigeant : « quand il découvre la traduction de Gallimard, il décide de la reprendre. Comme il l’a déjà fait, Gary retraduit le livre et se demande s’il ne pourrait pas aller plus loin encore qu’avec John Markham Beach. Gary traducteur sera donc cette fois une femme : Françoise Lovat. Deux faux noms, un changement de genre, un changement de langue et une traduction : cela fait beaucoup pour un seul homme. Gary assume tous les rôles. » (Maxime Decout, « Des faux papiers en règle », Raison présente, n° 208, 103-114). Rare premier tirage, sans la vignette présentant le visage de Romain Gary.
Édition originale. Un des 80 exemplaires sur vélin pur fil. Directement écrit en anglais, le livre sera non pas traduit, mais complètement réécrit en français cinq ans plus tard par Romain Gary. Reliure de Bichon. Paris, Gallimard, (6 mai) 1969. 1 vol. (140 x 205 mm) de 278 p. et [4] f. Chagrin orangé à encadrement, papier à décor sur les plats, titre doré, date en pied, tête cirée, couvertures et dos conservés, étui bordé (reliure signée de B. Bichon). Édition originale. Un des 80 exemplaires sur vélin pur fil (n° 75).
Directement écrit en anglais, le livre sera non pas traduit, mais réécrit en français cinq ans plus tard par Romain Gary. Le héros de ce portrait de la jeunesse américaine des années soixante, Lenny, ne croit plus aux valeurs de l’Amérique traditionnelle, sûre de son bon droit. Au Viêtnam, la guerre s’enlise et la protestation étudiante ne cesse de grandir : « Tu veux que je te dise Lenny ? C’est fini Gary Cooper. Fini l’Américain tranquille, sûr de lui et de son droit, qui est contre les méchants, toujours pour la bonne cause, et qui fait triompher la justice et gagne toujours à la fin. Adieu, l’Amérique des certitudes. Maintenant c’est le Viêtnam, les universités qui explosent, et les ghettos noirs. Ciao Gary Cooper. » Constat qui ne va pas sans quelque nostalgie de la part de l’auteur, qui aimait particulièrement Gary Cooper et s’amusait à se comparer à lui : « je suis un mélange de Gary Cooper et de Rudolf Valentino, en mieux parce que j’ai les yeux bleus […] Voilà ! »
Édition originale. Premier tirage, avec mention de « First printing ». Lady L. est le premier roman que Gary écrivit directement en anglais, et le premier, ainsi, dans une autre langue que le français. New York, Simon & Schuster, (décembre) 1958. 1 vol. (140 x 210 mm) de 215 p. et [1] f. Cartonnage et jaquette illustrée de l'éditeur. Édition originale. Premier tirage, avec mention de « First printing ».
Lady L. est le premier roman que Gary écrivit directement en anglais, et le premier, ainsi, dans une autre langue que le français. Quand, en 1944, Lesley Blanch rencontra Romain Gary, elle venait de fêter ses quarante ans, le jour du débarquement en Normandie. Rédactrice de Vogue, où elle supervisait les reportages depuis 1937, cette chroniqueuse londonienne, élégante, spirituelle, à l’indéniable talent littéraire, était estimée dans le milieu de la mode. Ils se marièrent le 4 avril 1945. Quelques mois plus tard, une carrière diplomatique s’ouvrit pour Gary. Épouse dévouée, Lesley l’accompagna de poste en poste, à Sofia, à Berne, à Paris, à New York et à Los Angeles, et lui enseigne sa langue à la perfection. « L’accent anglais, tant admiré, précisait-elle, redoublait de charme avec le froufroutement des r russes que Romain lui ajoutait. Il avait acquis une prononciation parfaite ; seul le timbre de sa voix, ce timbre profond et rauque, gardait quelque chose de slave. » Gary s’exprime rapidement avec aisance ; au point, même, d’écrire quatre romans directement dans cette langue : Lady L. est le premier, en 1958 (traduit en 1963), suivi par The Talent Scout (1961), The Ski Bum (1964) et The Gasp (1973). Gary traduisit entièrement par ailleurs La Promesse de l’aube, La Tête coupable et White Dog et participa de près aux traductions de Colors of the Day, The Roots of Heaven, A European Education, The Dance of Gengis Cohn et Europa. Et, indirectement via Ajar / Pavlowitch, à celle de Momo. « Malgré un divorce houleux et douloureux, Lesley Blanch et Romain Gary - surtout après sa séparation d’avec Jean Seberg, et plus souvent encore après la mort de celle-ci, établirent une ‘amitié téléphonique’. Elle s’était retirée à Menton, dans une maison de la baie de Garavan, où elle avait reconstitué son décor intime : tapis, divans, icônes, œuvres d’art, objets insolites, grimoires et livres russes imprimés avant la réforme de l’orthographe. Mais, par une nuit funeste d’avril 1994, un incendie anéantit tous ces trésors. À 90 ans, Lesley eut le courage de recréer un nouveau foyer, avant de mourir à près de 103 ans en 2007 ». (« Lesley Blanch, Une fée bienveillante », par Lucien d’Azay, Revue des deux mondes, mai-juin 2021). Bel exemplaire.
Émouvante lettre autographe des parents du dédicataire du premier livre premier livre de Romain Gary, Éducation européenne, qui vient d'être primé et qui le remercient de leur avoir offert un exemplaire dédicacé. St-Pierre-Quilbignon [Finistère], 13 janvier 1946. 3 pages (135 x 175 mm) en 1 f. plié, encre sépia. Merveilleuse, longue et émouvante lettre de la mère de l’aviateur de la France Libre Robert Colcanap, à Romain Gary. Robert Colnacap, âgé de dix-sept ans, est le dédicataire du premier livre de Gary, Forest of Anger, publié à Londres en 1944 et traduit quelques mois plus tard en français sous le titre de L’Éducation européenne. Colnacap, qui partagea la chambrée de Gary, est mort lors d’un exercice, quelques mois avant le débarquement de Normandie. Les deux hommes s’étaient liés d’amitié au sein du groupe Lorraine.
« Monsieur et cher ami, Je m’excuse de vous donner cette appellation, justifiée seulement par la camaraderie qui vous unissait à notre Robert. Je ne saurais vous dire à quel point nous sommes touchés, mon mari et moi, du geste délicat que vous avez eu en nous adressant L’Éducation européenne écrit à la Mémoire de notre malheureux fils et signé de votre main. […] J’aimerais tant savoir où, quand, et dans quelles circonstances vous avez connu notre enfant. Les biographies que j’ai pu lire vous concernant sont muettes – bien entendu – sur votre activité militaire. Je sais seulement que vous êtes un des rares rescapés parmi les aviateurs des Forces Françaises Libres en Angleterre, et que vous avez fait à l’avance, comme tant d’autres, le sacrifice de votre vie pour que l’Humanité devienne enfin libre. […] Si notre petit a eu connaissance de votre roman, il n’a pas dû vous ménager son admiration. Et, s’il vivait encore, comme il savourerait la joie de vous voir décerner aujourd’hui le Prix des Critiques ! [...] ». Forest of Anger s’ouvre avec l’évocation de son camarade Robert Calcanap, qui s’était engagé dans les Forces françaises libres à l’âge de dix-huit ans. Gary le lui dédie ainsi : « À la mémoire de mon camarade, le Français libre Robert Colcanap ». D’une mère institutrice et d’un père qui sert dans la Marine, Robert Colcanap est né le 11 mai 1922, près de Morlaix. La famille Colcanap s’installe à Brest en 1926. Encore lycéen au moment de la signature de l’armistice, et donc trop jeune pour avoir eu la possibilité de combattre, il décide de rallier La France Libre. Le jour même de l’appel du 18 juin, il embarque à Brest à bord du Meknès, à destination de l’Angleterre. Dès son arrivée sur le sol britannique, il demande à servir dans l’aviation. Refus, direct, de Charles de Gaulle : « jeune homme, passez d’abord vos diplômes ». Il obtient son certificat d’admission au lycée français de Londres, le 25 septembre 1940, passe son concours, et signe derechef le 28 octobre suivant un engagement volontaire dans les FAFL, sous le matricule n° 30.503. Il est affecté sur le cuirassé Courbet, puis transféré au camp de Old Dean à Camberley. Malgré son jeune âge, il se distingue par de premiers états de service remarquables, et remarqués. Nommé sous-lieutenant le 15 décembre 1942, il rejoint le groupe de bombardement Lorraine. Il en restera l’éternel benjamin. C’est au cours d’un exercice, le 11 novembre 1943, au-dessus de l’Angleterre, qu’il trouve la mort, suite à un accident de moteur de son appareil, un Boston III BZ. Sept mois auparavant, le 4 avril 1943 à Londres, Robert Colcanap avait rédigé son testament dont voici un extrait : « Je voudrais que soient conservés mes livres de médecine-Physique-Chimie (achetés avec mes économies), les poésies de Baudelaire, de Péguy et surtout la vie de Mozart ainsi que mes concertos et sonates pour violon, lesquels ont été pendant de longs mois mes meilleurs compagnons et ont constitué la meilleure des consolations. Je regrette de ne pouvoir vous laisser les deux objets auxquels je tenais le plus ; un Kodak 35 acheté au Caire en avril 42 et une ciné-caméra 8 mm (fruits de mes économies) tous deux perdus au cours du torpillage à cent kilomètres au large de Durban, le 1er novembre 1942. J’ai également perdu ce jour mon carnet de route, commencé le 18 juin 1940, sans compter des photos et films pris au Kenya. Grâce à ces documents il eut été facile de retrouver ma vie depuis cette date fatale du 18 juin 1940. Il y avait là, matière à plusieurs romans. Je suis heureux d’avoir fait ce que je considère comme mon devoir ; si c’était à refaire je recommencerais. J’estime en toute conscience que je n’ai rien à me reprocher. ». Plusieurs passages de La Promesse de l’aube et de L’Éducation européenne font directement référence à des événements vécus par l’auteur durant ce service. Pour être plus complet, c’est sur une phrase et un portrait de Robert Colnacap que s’ouvre l’ouvrage de référence consacré au groupe Lorraine : « Nous jurons de rendre à la patrie sa liberté ! Le 19 juin 1940, un gamin rieur de seize ans et demi débarque en Angleterre. Il s’appelle Robert Colnacap » (incipit de Les Bombardiers de la France libre. Groupe Lorraine, par François Broche, Paris, Presses de la Cité, 1979). Le groupe de bombardement Lorraine reçoit la Croix de la Libération, le 28 mai 1945. Au cours du conflit, il a effectué plus de 3 000 sorties, déversant 2 500 tonnes de bombes et perdant 127 hommes. Le 18 juin 1945, il participe au défilé aérien au-dessus des Champs-Élysées en formant une croix de Lorraine avec ses appareils. Il est dissous en 1952, donnant un an plus tard naissance à la 30e escadre de chasse, aujourd’hui intégrée dans la prestigieuse BA118 de Mont-de-Marsan, l’une des plus grandes bases de l’Armée de l’air française.
Edition originale. Un des 22 premiers exemplaires sur vélin de Hollande. Reliure signée d'ALix. Paris, Gallimard, (24 juin) 1966. 1 vol. (135 x 205 mm) de 328 p. et [4] f. Maroquin rouge, dos lisse, titre doré, date en pied, tranches dorées sur témoins, doublures et gardes de box crème, couvertures et dos conservés, étui bordé (reliure signée de Alix). Edition originale. Un des 22 premiers exemplaires sur vélin de Hollande (n° 3).
« Les mangeurs d’étoiles », ce surnom donné aux Amérindiens de l’hémisphère sud consommant des plantes hallucinogènes, Gary l’applique aux personnes qui poursuivent un rêve : ici, l’irrésistible ascension et la chute d’un Indien cujon, Al Mayo, dictateur d’une république caribéenne, en quête d’un pacte avec le diable. Une transposition moderne du Faust de Goethe où les États-Unis jouent le rôle de Méphistophélès. Gary est particulièrement bien placé pour cela : le cadre géographique du roman lui est fourni lorsqu’il est nommé consul général de France à Los Angeles en 1961. Chargé d’une mission de remplacement, il prend trois mois durant la gérance de l’ambassade de France à La Paz, en Bolivie - il n’y avait plus d’ambassadeur depuis six mois et « cette vacance indisposait le dictateur du moment » (Myriam Anissimov, Romain Gary le caméléon, Denoël, 2004, p. 284). Il s’imprègne alors de cette atmosphère sud-américaine, à l’origine de deux nouvelles : « Les oiseaux vont mourir au Pérou » et « La plus vieille histoire du monde ». Ce sera le cadre de son roman, qui a alors pour titre Le Mangeur d’étoiles sous lequel il le recense encore parmi ses œuvres dans le premier chapitre de Pour Sganarelle (1965). Dans une interview donnée à Pierre Desgraupes le 2 novembre 1966, Gary développe tout ce qu’il cherchait à y montrer ; et synthétise ainsi : « Goethe a franchement menti. La véritable tragédie de Faust ce n’est pas qu’il ait vendu son âme au Diable, c’est qu’il n’y a pas de Diable pour vous l’acheter. » Le titre forme le premier volet de La Comédie américaine, complétée en 1969 par Adieu Gary Cooper : l’un et l’autre avaient d’abord été publiés en anglais : sous les titres The Talent Scout en 1961 pour le premier et The Ski Bum en 1965 pour le second. Comme Lady L. trois ans auparavant, la traduction française a été établie par Jean Rosenthal avec le concours de l’auteur. Lorsque le roman est publié à Londres en 1961, il est présenté comme une traduction d’un certain John Markham Beach, qui se serait aussi chargé de la transposition en anglais de La Promesse de l’aube (Promise at Dawn). Un pseudonyme de plus à l’actif de Gary ! Bel exemplaire.
Édition originale. Un des 10 premiers exemplaires d'auteur sur alfa.Avec une lettre du journaliste du Figaro Georges Ravon à Romain Gary : « je veux vous dire, sans plus tarder, combien ce livre m'a passionné ». Paris, Gallimard, (28 décembre) 1948. 1 vol. (120 x 190 mm) de 305 p. et [3] f. Broché, sous chemise et étui. Édition originale. Un des 10 exemplaires d’auteur sur alfa (n° 4), seul papier avec les 20 exemplaires sur pur fil. Jointe : lettre tapuscrite signée de Georges Ravon à Romain Gary : « … je viens lire d’un trait ‘Le grand vestiaire’ et je veux vous dire, sans plus tarder, combien ce livre m’a passionné », datée de 10 février 1949, à en-tête du Figaro.
Le roman a été rédigé alors que Gary occupe son premier poste diplomatique, comme attaché d’ambassade. Une période pendant laquelle, sous le nom de code de « Libraire », l’écrivain fut traqué par les services secrets bulgares, qui infiltrèrent son entourage et épièrent chaque geste de sa vie quotidienne. « C’était passionnant et triste de voir le passage d’un État, d’une pseudo-démocratie monarchiste, à une dictature totalitaire de type stalinien », dit-il dans son dernier entretien, accordé à Radio-Canada quelques mois avant son suicide, en décembre1980. Gary avait rejoint son poste en février 1946 ; Lesley Blanch le rejoindra quelques mois plus tard. Tulipe n’a pas connu un grand succès : Gary s’empresse alors de rédiger ce Grand vestiaire, qu’il terminera à Paris à la fin de l’été 1948. La lettre de Ravon dut plaire à Gary : ce brillant chroniqueur du Figaro fut également un grand homme de théâtre, entre autres à l’Odéon et chez Gaston Baty, au Théâtre des Champs-Elysées. Il tiendra après-guerre un billet quotidien dans Le Figaro, écrit « en courant » par un observateur attentif de la vie quotidienne, et donnera de nombreux reportages au Figaro littéraire.
Édition originale. Un des 20 premiers exemplaires sur vergé de Hollande.Exemplaire parfait d'un passionnant roman de Romain Gary. Paris, Gallimard, (7 mai) 1973. 1 vol. (150 x 220 mm) de 394 p. et [3] f. Broché, non coupé, sous chemise et étui. Édition originale. Un des 20 premiers exemplaires sur vergé de Hollande (n° 5).
Avec Éducation européenne et Europa, Les Enchanteurs est le roman de Romain Gary dont la dimension européenne est la plus évidente, et notamment la veine slave. Pour commettre ce roman dont l’action se déroule entièrement au XVIIIe siècle, Gary s’est abondamment documenté : il « lut de nombreux ouvrages datant du siècle des Lumières ou portant sur cette période. Outre les Mémoires de Casanova, ou de personnages comme Alexandre de Tilly, nous savons qu’il s’inspira particulièrement de La fille du capitaine de Pouchkine, un de ses auteurs favoris ; ainsi que du livre de Pierre Pascal La Révolte de Pougatchev. La solidité de ces références historiques et le talent de conteur de Gary donne à cette histoire un caractère fantastique » (Larat, Romain Gary, une trajectoire dans le siècle, II, p. 83). Il y met en scène la famille Zaga, des saltimbanques de Venise passés maîtres dans l’art de l’illusion, qui prédisent l’avenir ou soignent les maladies les plus incongrues : tous maîtrisent la comedia dell’arte à la perfection, celle que Gary jouera de main de maître l’année suivante puisqu’il publiera – un record – quatre titres sous les noms de quatre auteurs différents (François Bondy, Émile Ajar, Shatan Bogat et René Deville). Exemplaire parfait.
Premier tirage post prix Goncourt, imprimé le jour même de l'attribution du prix. Envoi signé : « Pour Raymond Melix, Romain Gary, 1956 ». Paris, Gallimard, (3 décembre) 1956. 1 vol. (135 x 205 mm) de 443 p. et [2] f. Broché, sous coffret à reprise de décor. Premier tirage post prix Goncourt, imprimé le jour même de l’attribution du prix. Envoi signé : « Pour Raymond Melix, Romain Gary, 1956 ».
Rare exemplaire imprimé du jour du Goncourt, dédicacé par Gary au moment de son passage éclair en France pour recevoir le prix et répondre aux multiples sollicitations. Romain Gary, qui se trouve à La Paz au moment de l'annonce, obtient du Quai d'Orsay une disponibilité de deux semaines pour la fin du mois de décembre 1956. Premier roman à avoir ouvertement pour sujet central la protection de la nature, Les Racines du ciel est aussi - encore - un roman de résistance : « celui de la résistance à tout ce qui opprime l'homme, où que ce soit et de quelque manière que ce soit ». C'est pourquoi Gary écrivit en décembre 1956 après l'entrée des chars russes à Budapest : « Il faut sauver les éléphants hongrois. Ils reprendront un jour leur marche triomphale » (Larat, Romain Gary, Une trajectoire dans le siècle, II, p. 48).
Édition originale. Un des 80 exemplaires sur vélin pur fil. Directement écrit en anglais, le livre sera non pas traduit, mais complètement réécrit en français cinq ans plus tard par Romain Gary. Mouillure claire à l'angle supérieur du premier feuillet, sinon, excellente condition. Paris, Gallimard, (6 mai) 1969. 1 vol. (140 x 205 mm) de 278 p. et [4] f. Broché, non coupé. Édition originale. Un des 80 exemplaires sur vélin pur fil (n° 99).
Directement écrit en anglais, le livre sera non pas traduit, mais réécrit en français cinq ans plus tard par Romain Gary. Le héros de ce portrait de la jeunesse américaine des années soixante, Lenny, ne croit plus aux valeurs de l’Amérique traditionnelle, sûre de son bon droit. Au Viêtnam, la guerre s’enlise et la protestation étudiante ne cesse de croître : « Tu veux que je te dise Lenny ? C’est fini Gary Cooper. Fini l’Américain tranquille, sûr de lui et de son droit, qui est contre les méchants, toujours pour la bonne cause, et qui fait triompher la justice et gagne toujours à la fin. Adieu, l’Amérique des certitudes. Maintenant, c’est le Viêtnam, les universités qui explosent, et les ghettos noirs. Ciao Gary Cooper. » Constat qui ne va pas sans quelque nostalgie de la part de l’auteur, qui aimait particulièrement Cooper et s’amusait à se comparer à lui : « je suis un mélange de Gary Cooper et de Rudolf Valentino, en mieux parce que j’ai les yeux bleus […] Voilà ! » Mouillure claire à l’angle supérieur du premier feuillet, sinon, excellente condition.
Traduction de Stuart Gilbert. Préface inédite de Romain Gary, qui rend hommage à un ami, rencontré dès 1945.C'est la seule préface à une oeuvre véritablement littéraire que Gary donnera. New York, Times Inc., 1962. 1 vol. (130 x 200 mm) de 269 p. Broché, sous couverture illustrée. Traduction de Stuart Gilbert. Préface inédite de Romain Gary.
Gary mentionnera Albert Camus dès 1945, dans une lettre adressée à Maurice Nadeau. Les deux hommes entrent vite en relation, malgré leurs éloignements géographiques constants. En 1947, Camus enverra à Gary La Peste, enrichi d'une dédicace faisant explicitement référence à Éducation européenne. Marqué par sa disparition en 1960, Gary acceptera de préfacer l'édition américaine du texte, réédité en 1962. Hommage d’une amitié forte, et méconnue, entre les deux hommes : « Il est très difficile, curieusement, de se rappeler les paroles d’amis disparus ; c’est qu’on ne fait pas trop attention quand ils sont présents. Je me souviens du sourire de Camus et de la gravité de son visage - les deux expressions se succédaient parfois en quelques secondes - bien mieux que de sa conversation. Je n’ai jamais fait grand cas des paroles, de toutes façons. Mais maintenant que sa voix s’est tue, les mots ne me font que mieux sentir à quel point elle me manque. Il me semble toutefois me rappeler qu’il disait… non en fait, rien de bien important. ‘Juste qu’il est des vérités qui valent qu’on meure pour elles, mais aucune qui vaille qu’on tue en leur nom.’ C’est alors qu’il écrivit La Peste. »
Édition pré-originale et seul extrait du premier livre publié de Romain Gary : on retrouve ce texte dans Forest of Anger, qui sera publié, en anglais, en décembre. in La France libre, Londres, vol. VIII, n° 45, 15 juillet 1944. 1 vol. (185 x 245 mm) de 230 p. et [7] f. Broché. Édition pré-originale et seul extrait du premier livre publié de Romain Gary : Forest of Anger [Education européenne]
Le chapitre sera intégré dans le premier livre que Gary publia : L'Éducation européenne. Le roman, dont l'action débute en septembre 1942 et se termine au printemps de 1943, est rédigé dans les mois suivants, c'est-à-dire au cours de l'été et de l'automne 1943. Dans une lettre à Pierre Calmann de novembre 1944, Romain Gary parle de son roman sous le titre La Forêt engloutie - qui est vraisemblablement le titre qu'il portait sur le manuscrit original, aujourd'hui perdu. Une seule parution en revue d'un extrait aura lieu : ce sera ce texte de six pages, intitulé « Le Continent englouti », qui coïncidera au chapitre 17 du roman ; c'est le fameux passage contenant la fable « les Bourgeois de Paris ». C'est la seule édition pré-originale du texte. L'ouvrage paraîtra quatre mois plus tard, en décembre 1944, aux Cresset Press à Londres, sous le titre Forest of Anger. Romain Gary raconte dans La Promesse de l'aube ce moment où il s'est senti reconnu comme écrivain pour la première fois : lorsqu'il apprend que son roman va être publié, alors qu'il rentre d'une mission aérienne avec son escadron du groupe Lorraine. Lorsqu'il arrive à Londres, en 1943, il ne parle pas un seul mot d'anglais : son mariage, en 1945, avec Lesley Blanch lui offre de perfectionner sa connaissance de la langue, lui permettant de devenir, en moins de deux ans, parfaitement bilingue. Rare.
Célèbre portait, pris en 1956, quand Gary arrive en France pour recevoir les honneurs du prix Goncourt qu'il vient d'obtenir pour Les Racines du ciel. [Paris, décembre 1956]. 1 tirage de presse (180 x 240 – 170 x 205 mm sans marge) noir et blanc, sur papier « Guilleminot ». Tampons et légende au dos. Célèbre portait, pris en 1956, quand Gary arrive en France pour recevoir les honneurs du prix Goncourt qu’il vient d’obtenir pour Les Racines du ciel.
Le quai d’Orsay a octroyé à l’écrivain une disponibilité de deux semaines, pendant lesquelles il répond aux interviews et passe notamment dans l’émission de l’ORTF « Lectures pour tous », animée par Pierre Dumayet, qui reçoit Gary le 19 décembre. Il y est sujet des vives critiques qui attaquèrent le style « mal écrit » des Racines du ciel. Gary, très honoré et heureux de déclencher de telles vives polémiques, répond avec humour et délicatesse : « À tout ouvrage correspond un style : quand vous lâchez un troupeau d’éléphants à travers l’Afrique, que vous évoquez la sueur, la brousse, la forêt vierge, des aventuriers […], vous ne pouvez pas le faire dans le style de la Princesse de Clèves ni de la duchesse de Guermantes. Il faut essayer d’inventer un langage à vous […]. Je suis obligé de renoncer à certaines élégances du style, je ne fais pas de Giraudoux – Dieu sait si j’adore Giraudoux – et quand il faisait descendre ses dieux de l’Olympe pour les promener dans les antichambres des ministères, il les habillait chez Dior. Mais moi, mon Morel, je peux pas l’habiller chez Dior ! ». Souvent reproduite, cette photographie, prise quelques jours plus tard dans les locaux des Éditions Gallimard, a servi pour la couverture de l’ouvrage de Nancy Huston, Le Tombeau de Romain Gary (Actes Sud, 1999).
Première édition club, pour la collection « Soleil ». Tirage à 3100 exemplaires, avec sa bande à parution.Treize titres de Romain Gary seront publiés dans cette collection. Paris, Gallimard, collection « Soleil », (2e trimestre) 1969. 1 vol. (140 x 200 mm) de 378, [3] p. et 1 f. Cartonnage éditeur. Première édition club, pour la collection « Soleil ». Un des 3100 exemplaires (dont 100 hors commerce) imprimés sur bouffant alfa Calypso (n° 1354). Avec sa bande à parution.
Sixième titre publié de Romain Gary dans cette collection. Les titres de la « Collection soleil » sont édités sous des reliures pleine toile de différentes teintes (rose, jaune, orange, bleu, vert...), relié dans une maquette de Massin. La collection reprend des livres du fonds, mais aussi des nouveautés tout juste parues. Elle a été créée en 1957, afin de concurrencer le Club du meilleur livre (société filiale de Gallimard et Hachette) : Claude Gallimard était hostile à l'idée qu'Hachette bénéficie de l'exploitation de son fonds en librairie sous forme de livres reliés. Le tirage est limité à quelques milliers d'exemplaires, avec cet argument publicitaire au lancement : « Le soleil, dit Fontenelle, est l'orgueil des planètes. Les livres de la collection «Soleil», tous au format in-8° soleil, seront l'orgueil de votre bibliothèque. » Treize titres de Romain Gary auront l'honneur d'y figurer : Lady L., La Promesse de l'aube, Les Mangeurs d'étoiles, La Danse de Gengis Cohn, La Tête coupable, Adieu Gary Cooper, Chien blanc, Europa, Les Enchanteurs, Au-delà de cette limite..., Clair de femme, Charge d'âme et Les Clowns lyriques. Il n'est pas dépassé que par Simone de Beauvoir (14 titres), Jean Giono (16) et Henry de Montherlant (22 !).
Edition originale. Un des 80 premiers exemplaires sur vélin pur fil. Paris, Gallimard, (15 septembre) 1952. 1 vol. (135 x 205 mm) 267 p. et [2] f. Maroquin vert à encadrement, titre doré, date en pied, plats ornés d'un papier à décor, tête dorée, couvertures et dos conservés (reliure signée d'Alix). Edition originale. Un des 80 premiers exemplaires sur vélin pur fil (n° 19).
En 1951, Henri Hoppenot, un grand diplomate qui fut le représentant de la France libre à Washington pendant la guerre, est nommé à Berne – le lieu des grandes conférences internationales de l’après-guerre. Fin lettré, « l’ambassadeur a lu les rapports et analyses envoyées depuis Sofia par le conseiller Gary. Il apprécie le parcours unique du jeune diplomate-auteur » (Pavlowitch, Tous immortels, p. 78). Alors, direction Berne, avec Lesley Blanch. C’est là-bas qu’il prépare Les Couleurs du jour et que, en fin d’année, le journal officiel publie officiellement sa substitution de nom : Romain Kecew devient Romain Gary. Lequel fait, dans son nouveau roman, directement allusion aux souvenirs du temps où Kacew/Gary servait dans l’aviation : « Les couleurs du jour », c’est le nom que l’escadrille Lorraine donnait aux fusées qui servaient à distinguer les avions ennemis des amis. Le livre est divisé en quatre parties : bleu, rouge, noir et blanc. Le héros, Jacques Rainier, ancien de la France Libre, s’apprête à rejoindre les troupes de l’Onu en Corée. Gary est visionnaire : quelques mois plus tard, au printemps 1952, Hoppenot est nommé ambassadeur et chef de la délégation française à New York, à l’Onu. Il intègre Romain Gary dans son équipe, comme secrétaire, consul et porte-parole. Bel exemplaire du tirage tête.
Édition originale. Premier tirage (pas de grands papiers). La célèbre couverture de ce primo-roman de Ajar-Gary est l'oeuvre de Folon. Paris, Mercure de France, (21 août) 1974. 1 vol. (140 x 205 mm) de 222 p. et [1] f. Broché, sous couverture illustrée. Édition originale. Premier tirage (pas de grands papiers). La célèbre couverture de ce primo-roman de Ajar-Gary est l'oeuvre de Folon.
De mars à décembre 1973, la même année qu’Europa et Les Enchanteurs, Romain Gary écrit Gros-Câlin, un roman sur la solitude, qu’il écrit à la main. Son secrétaire a ensuite tapé le manuscrit à la machine, tandis que l’écrivain le recopiait au propre, de façon manuscrite, à l’encre bleue, dans quatre gros registres noirs de comptable, comme preuve de l’authenticité de sa création. C’est ainsi qu’il procédera, avec méthode, pour chacun des romans signés Ajar. « Ce fut seulement après avoir terminé Gros-Câlin que je pris la décision de publier le livre sous un pseudonyme, à l’insu de l’éditeur. Je sentais qu’il y avait incompatibilité entre la notoriété, les poids et mesures selon lesquels on jugeait mon œuvre, « la gueule qu’on m’avait faite », et la nature même du livre. » Pour la première fois, en moins de six mois, un seul homme aura publié quatre livres sous quatre noms différents (François Bondy, Shatan Bogat, Romain Gary, Émile Ajar). C’est à l’automne de l’année suivante que Gary décidera de donner une voix, puis un corps à Émile Ajar, en proposant à son petit-cousin de trente-trois ans, Paul Pavlowitch, de l’incarner. Ce titre ne sera pas traduit en anglais. Très bel exemplaire de ce livre fragile (couverture pelliculée) et rare.