Oxford, The Voltaire Foundation, 1981, gr. in-8°, 265 pp, liste des ouvrages cités, index, reliure pleine toile bleue de l'éditeur, dos lisse avec titres dorés, jaquette, bon état (Studies on Voltaire and the eighteenth century). Texte en français
"Dans l'œuvre immense de V., Paris tient une place considérable, constitue même une sorte de thème obsessionnel qui se manifeste ou affleure dans quelque 5000 lettres et dans de nombreux écrits, où la capitale peut s'appeler Memphis, Persépolis ou Babylone. Dans un livre très clair et bien construit, l'A. étudie l'élaboration d'un véritable mythe, dont l'importance dans la pensée voltairienne varie en fonction des époques et des circonstances. La 1ère partie met en évidence, dans l'expérience vécue par V., une « trajectoire de la liberté ». Élevé à Paris, il a acquis la certitude que là seulement la vie peut être « douce et aimable ». Très tôt cependant, il éprouve le sentiment d'y être persécuté, d'y disperser ses forces. Toute son existence s'écoulera dans une oscillation entre le rejet et l'idéalisation. Éloigné de Paris, il a tendance à célébrer le séjour parisien ; en même temps, il sait les charmes et les bénéfices de la retraite, propice au travail et à la liberté. Même son dernier séjour, en 1778, verra la fatigue et le dégoût succéder à une éphémère griserie. Paris est, pendant soixante ans, objet de fascination et de condamnation pour un V. qui éprouve à la fois le désir de vivre dans la capitale de l'esprit et des arts et la crainte de l'aliénation. La 2ème partie, thématique, analyse les opinions de l'écrivain. Il y a chez V. un urbaniste hardi, qui souhaite une rénovation radicale de la ville par une politique de travaux publics susceptible de procurer du travail aux sans emploi. L'éloignement favorise aussi l'élaboration d'un mythe. V. fait l'apologie du Paris du 17e siècle opposé au Paris moderne, aliénant, agité, destructeur des rapports humains, dangereusement représentatif des excès d'une urbanisation galopante. Il lui oppose aussi la campagne et la nature, la solitude, propres au travail. Il porte sur Paris un regard d'éthnologue, contribue à la formation du mythe d'un Paris corrompu, frivole et trouble, prisonnier des modes. Paris tragique aussi, lieu d'intolérance civile et religieuse, où une populace barbare a pu applaudir au supplice de La Barre. Sa critique de Paris se double d'une quête du bonheur, d'une formule de vie." (R. Trousson, Dix-Huitième Siècle, 1983)