Édition originale des œuvres en rimes, des jeux et des passe-temps de Baïf et première originale collective de l’ensemble de son œuvre. A Paris Pour Lucas Breyer Marchant libraire, 1573. Avec privilège du Roy. In-8. Les Amours de Ian Antoine de Baif. A Monseigneur le duc d’Anjou fils et frere de Roy. A Paris, Pour Lucas Breyer, 1572. In-8. Les Jeux. De Ian Antoine de Baïf. A Monseigneur le duc d’Alençon. A Paris, Pour Lucas Breyer, 1572. Avec privilège du Roy. In-8. Les Passe-temps de Ian Antoine de Baïf. A Monseigneur le Grand Prieur. A Paris, Pour Lucien Breyer, 1573. Avec privilège du Roi. In-8. Ensemble 4 volumes in-8. Maroquin bleu orné d’un médaillon fleuri au centre des plats, dos à nerfs ornés d’un fleuron répété, large dentelle intérieure, double filet sur les coupes, tranches dorées sur marbrure. Trautz‑Bauzonnet. 162 x 98 mm.
Édition originale des œuvres en rimes, des jeux et des passe-temps de Baïf et première originale collective de l’ensemble de son œuvre. Baïf fut choisi par Ronsard parmi les six meilleurs poètes de la célèbre « Brigade » pour constituer la Pléiade. « Ces poésies sont fort recherchées et ne se trouvent pas facilement complètes » notait déjà Brunet en 1863. D’origine angevine, né en 1532 à Venise où son père était ambassadeur, Jean-Antoine de Baïf suivit les leçons de Dorat avec Ronsard. Après avoir chanté l’amour en pur pétrarquiste, il le rencontra à Poitiers et le célébra avec ferveur dans les Amours de Francine (1555). Il fonda en 1570 une académie de musique et de poésie et imagina alors de faciliter la collaboration entre poètes et musiciens en adoptant la métrique gréco-latine, comme dans ces vers légers : Amour, amiables fillettes, Amour à la pénible chasse Ne se trouve point au marché Ne s’attrape pas à quester, Pour qui le voudroit acheter : Toyles ny rez rien ne lui font : - Aimer il faut pour estre aymé. - Aymer il faut pour estre aymé Mises en musique, les Chansonnettes mesurées charmèrent la cour et la ville. Mais le meilleur de Baïf est dans son adaptation des Psaumes et dans certains sonnets des Amours de Francine. « N’y m’esloigner du long des plus lointains rivages, Ny par les monts déserts, tout seulet, m’escarter, Ny dans les bois obscurs tout le jour m’arrester, Ny entrer dans le creux des antres plus sauvages, Ne m’ostent tant à moy, que de toy mille images Ne viennent à mes yeux par tout se présenter, Où que je sois caché, me venant tourmenter, Navrans mes yeux de peur, mon cuer de mille outrages. Si l’œil se jette en l’eau dedans l’eau je te voy ; Tout arbre par le bois me semble que c’est toy, Dans les antres, au mont, me recourt ton image. Or il faut bien qu’Amour soit aislé comme on bruit, Quand par tout où je fuy, léger, il me poursuit, Toujours devant mes yeux remettant ton visage. » L'œuvre de Baïf se distingue par son abondance, sa variété, et son caractère expérimental souvent audacieux. Esprit éclectique, « inventif et laborieux » selon ses propres termes, ce poète humaniste a passé sa vie à étudier et à écrire, et s'est essayé à tous les genres et à tous les styles avec une inégale persévérance : sonnet et chanson pétrarquiste, mignardise anacréontique, épigramme facétieuse et gauloise, narration mythologique, tragédie, comédie, églogue satire morale ou politique, poésie gnomique à base de proverbes et de sentences versifiées, fable ésopique, lyrisme religieux... Sa réputation d'érudition, d'abord flatteuse, semble ensuite s'être retournée contre lui, quand la postérité s'est plu à faire du « docte, doctieur et doctime Baïf » célébré par Du Bellay une caricature du pédant, lui reprochant son « érudition effréné e» (Chamard). Parce qu'il a beaucoup traduit et paraphrasé, en français et en latin, en prose et surtout en vers, rimés ou mesurés, parce qu'il a considéré la poésie comme un art de la mémoire et de la réécriture, « déversant dans ses œuvres, par imitation volontaire ou par simple réminiscence, tous les souvenirs de son humanisme » (Chamard), on a parfois douté de l'originalité de son talent. Il est juste de souligner sa parenté avec les poètes alexandrins de l'Antiquité, auxquels Dorat l'avait initié. Sa prédilection pour la mythologie et pour un certain réalisme rustique, ses procédés de composition maniéristes, son goût du mot populaire ou archaïque, ses recherches rythmiques sont autant de traits qui l'apparentent aux poètes des Ptolémées. Mais on retient surtout l'audace de ses recherches formelles et l'importance de sa contribution au renouveau musical de son temps. Après avoir expérimenté dans ses vers rimés nombre de combinaisons rythmiques inédites, cet esprit sociable, actif, curieux et entreprenant a orchestré au sein de son Académie une véritable métamorphose de la musique vocale. Peut-être trop dispersé dans ses intérêts, sans doute n'a-t-il jamais produit de véritable chef-d’œuvre ; son œuvre immense n'en incarne pas moins les hautes ambitions morales, intellectuelles et artistiques de la Pléiade. La recherche actuelle tend à lui restituer un rôle de premier plan dans le renouveau esthétique issu de l'humanisme. Rarissime première édition collective, en très grande partie originale, l’une des plus recherchées de la pléiade. Superbe impression homogène pour les quatre volumes, en caractères fins italiques. Les bois typographiques sont également utilisés de manière harmonieuse au travers des volumes. Elle réunit : - Les Amours. A Paris, Pour Lucas Breyer, 1572. (8) ff. et 232 ff. En partie originale. Contient 6 poèmes d'Etienne de la Boetie. - Les Jeux. A Paris, Pour Lucas Breyer, 1572. (4) ff. et 232 ff., le dernier chiffré par erreur 230. La date du titre, comme souvent, a été modifiée par l’adjonction manuscrite d'un I au chiffre mdlxxii. Edition originale. - Œuvres en Rime. A Paris, Pour Lucas Breyer, 1573. (10) ff. et 272 ff. Bien complet de l'extrait du privilège, et du rarissime feuillet a10, blanc avec fleuron typographique. En grande partie originale. - Les Passetems. A Paris, Pour Lucas Breyer, 1573. (4) ff. et 128 ff. chiffrés par erreur 126. Edition Originale. Tchemerzine, pp. 268-279 ; Jean Vignes, « Henri III et Jean-Antoine de Baïf, mécénat rêvé, mécénat réel », in Henri III mécène des arts, des sciences et des lettres, 2006, pp. 144 et suiv. Superbe exemplaire à très belles marges (hauteur 162 mm contre 157 mm pour l’exemplaire relié par Lortic vendu 245 000 FF (37 000 €) le 17 mai 1991, il y a 29 ans et 156 mm pour l’exemplaire H. Drury vendu 45 000 € le 15 décembre 2006, il y a 14 ans). Brunet souligne que ces quatre volumes sont très recherchés et ne se rencontrent pas facilement réunis et Deschamps, dans le supplément à Brunet, cite deux exemplaires en 4 volumes en reliure identique à celui-ci au prix de 1 500 F Or (en 1873) et 1 640 F Or (en 1876) sachant qu’un livre de bibliophilie pouvait alors s’acquérir à compter de 10 F Or. Des bibliothèques Robert Hoe et John Whipple Frothingham avec ex-libris.