Paris-La Haye, Mouton, 1973, gr. in-8°, 488 pp, 3 planches, graphiques, biblio, broché, couv. lég. salie, état correct
25 études érudites par R. Etienne (La conscience médicale antique et la vie des enfants), C. Klapisch (Attitudes devant l'enfant), F. Piponnier (Les objets de l'enfance), J.-N. Biraben (La médecine et l'enfant au Moyen Age), C. Patlagean (L'enfant et son avenir dans la famille byzantine, IVe-XIIe siècles), P. Riché (L'enfant dans le haut Moyen Age), C. Klapisch (L'enfance en Toscane au début du XVe siècle), J. Batany (Regards sur l'enfance dans la littérature moralisante), J. Le Goff (Petits enfants dans la littérature des XIIe-XIIIe siècles), A. Tenenti (Témoignages toscans sur la mort des enfants autour de 1400), F. Bonney (Jean Gerson : un nouveau regard sur l'enfance), J.-L. Flandrin, A. Corvisier, etc, etc. "Centré sur l'enfant et sa place dans la société, ce volume aborde le thème sous les aspects les plus divers : médecine et mortalité, avortement et contraception, l'enfance abandonnée et les nourrices, l'enfant et le monde du travail, l'enfant et la société militaire. Il comporte également des documents, des comptes rendus et une bibliographie sur l'enfant au XIXe siècle (A. Armengaud). L'ouvrage s'ouvre sur une communication de M. Robert Etienne sur La conscience médicale antique et la vie des enfants, qui montre que les médecins de l'Antiquité faisaient une large place à la contraception, entendue dans un sens beaucoup plus large que de nos jours, puisque pour eux la conception n'était effective que vers le troisième mois. L'avortement ne s'entendait que s'agissant d'un fœtus formé ou en mouvement. (.) Pendant le haut Moyen Age - comme le montrent deux études sur l'enfant à Byzance du IVe au XIIe siècle et une sur l'Occident mérovingien et carolingien - l'histoire de l'enfance reste uniquement fondée sur des textes littéraires. De même, pour le Moyen Age proprement dit où des théologiens comme Gerson permettent de jeter « un nouveau regard sur l'enfance ». Ce n'est qu'au début du XVe siècle - avec le fameux catasto florentin de 1427 à 1430 étudié par Christiane Klapisch - qu'on peut véritablement situer l'enfant dans la population d'une façon numérique. Sa place est considérable, puisque les moins de 14 ans représentent plus de 36 % de la population (.). Avec la période moderne, et surtout le XVIIIe siècle, on entre dans la période véritablement statistique qui permet d'étudier les taux de fécondité et de mortalité infantile, ainsi que le nombre des enfants abandonnés. Pour Reims à, la fin du XVIIIe siècle, A. Chamoux a pu, d'après les archives hospitalières, étudier les enfants trouvés et l'œuvre d'assistance qui se met en place à, l'Hôtel-Dieu. La mortalité infantile (46 % des enfants meurent avant la première année) reste effroyable, même si elle n'atteint pas le record de l'Hôtel Dieu de Paris (82 % des enfants y meurent avant le premier mois). Le XIXe siècle est, on le sait, celui du néo-malthusianisme : M. Armengaud, étudiant L'enfant dans la société du XIXe siècle, montre qu'il y avait cependant en France d'importantes disparités régionales ; le taux de fécondité du Finistère était deux fois plus élevé que celui du Gers. L'Angleterre, elle aussi, a bien sûr connu ce phénomène de baisse de la natalité ; cependant M. Laslett, historien de Cambridge, montre que cette chute, ainsi que d'une manière générale l'attitude de la société anglaise au XIXe siècle, est le prolongement de celle adoptée au siècle précédent : la dureté envers les enfants et leur exploitation existaient avant d'être décrites par Dickens ou par Engels. M. C. Fohlen, dans son étude Révolution industrielle et travail des enfants, arrive à la même conclusion : dès 1774 et explicitement dans un rapport de 1796, on peut constater l'état sanitaire et moral déplorable des enfants astreints aux longues journées et au travail de nuit. Robert Owen, quand il acheta en 1799 New Lanark, fit passer la journée de travail des enfants de 13 heures à 12 et se refusa à employer les enfants de moins de 10 ans ; sous son prédécesseur, les enfants qui travaillaient avaient « en moyenne de 5 à 6 ans, jusqu'à 7 ou 8 ». Une loi de 1802 restreint à, 12 heures la journée de travail pour les apprentis de l'industrie cotonnière et une loi de 1825 (qui ne prévoit pas de sanctions) limite la semaine de travail à 69 heures. En France, il fallut attendre 1841 pour qu'on fixe à 8 ans l'entrée à l'usine et qu'on limite la journée de travail des enfants de 8 à 12 ans à 8 heures et celle de ceux de 12 à 16 ans à 12 heures. La révolution industrielle a donc fait de l'enfant une source de plus-value au même titre que l'adulte, et, nous dit l'auteur, il a fallu de "longs combats" pour ramener l'exploitation à des limites "convenables"." (Jean Cavignac, Bibliothèque de l'école des chartes, 1977)