Paris, Michel Roethel, 1946. 14 x 20, 39 pp., broché, bon état (couverture défraîchie : bordure gauche piquée).
Hors-textes de : Brauner, Duchamp, Herold et Ubac.
Paris, Le Livre de Poche, Biblio, 1988. 11 x 16, 379 pp., broché, très bon état.
Bruxelles, Galerie Isy Brachot, 1979. 19 x 24, sans pagination, nombreuses illustrations en couleurs, broché, bon état.
S.l.n.d. [Les Busclats, 1975]. 24 + 5 f. (245 x 170 mm), sur Roma Fabriano, dans un carnet relié de demi-veau bleu.
Faire du chemin avec est... un texte que Char publie en 1976, et qu'il intégrera trois ans plus tard dans Fenêtres dormantes et portes sur le toit (Gallimard, 1979). Une oeuvre, crépusculaire et puissante, qui porte sur la folie des hommes et la beauté des choses. Le texte a été composé dès 1972, comme l'indiquent les deux manuscrits préalablement connus, donnés à Anne Reinbold, sa compagne d'alors, reliés par Georges Leroux, sur commande de Char. Ils sont aujourd'hui dans deux collections privées - l'un étant en vente publique en 2014 (Artcurial, 16 avril 2014, n° 334), avant que nous le présentions à l'exposition Supplément d'âme consacré à René Char, en 2015, à Lourmarin. René Char se fit néanmoins établir un troisième manuscrit, celui-là définitif et mis au propre, pour sa gouverne, que nous présentons aujourd'hui - et jusqu'ici inédit : Char l'a soigneusement composé et rédigé, d'une large plume à l'encre de chine noire, sur un papier d'exception : le Fabriano Roma - Michelangelo, un papier vergé 100% coton que le poète réservait à ses plus précieux manuscrits. Daté de 1975, il reprend l'intégralité du texte qui sera publié l'année suivante, dans un libelle - au sens premier de « petit livre » -, « tout en feuilles, sans couverture, comme un discours de Saint-Just à la Convention », en dira-t-il. Car le texte dénonce aussi, tel un pamphlet, les « utopies sanglantes du XXe siècle » : ces fragments disent « le sentiment d'impuissance et la nostalgie d'un temps où l'action politique était encore possible. Temps du maquis bien sûr, temps des Matinaux, temps des ‘dieux hagards' que sont Baudelaire, Melville et Van Gogh » (in Dictionnaire Char, p. 235). À la suite de ce texte, René Char en ajoute un second - qui sera lui aussi intégré à Fenêtres dormantes - : Couloir aérien. C'est le souvenir d'une promenade avec son ami Georges Duthuit, en 1948, dans le parc des Névons, près de L'Isle-sur-Sorgue. Un texte, là aussi capital, en parfait contrepoint du premier. « La nature et nous souffrons des mêmes maux, creusons les mêmes désaveux, répugnons au chaos. La nature et nous recelons la substance d'une même allégresse. Cependant que le rêve se glisse hors du rêve et s'empresse à distance dans ce monde brûlé, nous épargnons nos richesses pour un prochain désastre. Ah ! si bien se comprendre et si peu s'entraider. (...) Si le monde est ce vide, eh bien ! je suis ce plein. Une rose sans personne. Une rose pour verdir. (...) Quelques débris de neige serrent le coeur sans le glacer. Le temps reste à la neige. » Comme souvent chez Char, la lecture nous conduit comme en proximité et en voisinage du poète, sans prétendre pouvoir tout expliquer, tout mesures. Mais toujours ressentir. Le choix délibéré de réunir ces deux oeuvres à la suite - Faire du chemin avec... et Couloir aérien - et de les composer, pour soi, si soigneusement, montre bien toute l'importance que Char donnait à ses deux textes. Le titre du premier sera repris pour la première exposition majeure consacrée au poète, en 1990, à la Grande chapelle du Palais des papes d'Avignon : « René Char. Faire du chemin avec ». Il donnera également son titre au catalogue et au film de Richard Copans, réalisé en 1992, consacré à René Char et ses « alliées substantiels », ses amis les peintres. À cette date, Char a collaboré avec les plus grands : Braque, Picasso, Miro, Giacometti, Nicolas de Staël, jusqu'à Zao-Wou-Ki. Avant lui, un dernier artiste sera de son cheminement : Alexandre Galperine. Né en 1937 dans la colonie russe de Boulogne-Billancourt, il fréquente l'École des Beaux-Arts et les Ateliers de la Ville de Paris puis intègre l'atelier d'Henri Goetz (successeur d'André Lhote). Il s'installe en Provence où il fréquente René Char, de 1974 à 1988. De cette amitié naît une oeuvre graphique exclusive et multiple, en proximité des deux hommes. Galperine composera pour Char plusieurs manuscrits enluminés, et enrichira ses dernières oeuvres de petites images aussi poétiques que délicates. C'est à lui que René offrira in fine ce manuscrit, quelques mois avant sa mort, en 1988, en témoignage de leur amitié. Le manuscrit de Faire du chemin avec... pourra alors rejoindre les deux exemplaires que, douze ans auparavant, René Char lui avait offert, au moment de l'édition publiée : - le tirage de tête : seulement 50 exemplaires imprimés. Char offre ici l'exemplaire n° 49 à Alexandre Galperine ; - l'édition courante, qu'il dédicace à son ami avec cet envoi : « Pour Alexandre, sur toutes les routes de son souffle. R.C. » Une photographie originale des deux hommes, ensemble dans le jardin de la maison de Char, « Les Busclats », à L'Isle-sur-Sorgue, est ajoutée, ainsi qu'un dessin original de Galperine, en page de titre ; une délicieuse composition à la gouache d'un paysage, formant une allée bordée d'un grand arbre avec deux personnages cheminant, signé et daté ‘AG 76' par l'artiste. Ces plaquettes sont imprimées par la fameuse « imprimerie Union » de Louis Barnier. René Char en sera un familier pendant près d'un demi-siècle, depuis Le Marteau sans maître paru aux Éditions Surréalistes en 1934, jusqu'à la fin des années 1970. On y recense entre autres La bibliothèque est en feu (1956), Lettera Amorosa (1963), L'Effroi la Joie (Au vent d'Arles, 1969), Se rencontrer paysage et Contre une maison sèche (1975 et 1976) et enfin, toujours en 1976, ce Faire du chemin avec. Le manuscrit de René Char est composé sur le papier « Roma » vergé des papeteries Fabriano, l'un des papiers d'excellence du fabricant italien, au filigrane qui reproduit, en bas à gauche, l'inscription C.M. Fabriano, enfermant l'image d'un loup allaitant deux jumeaux dans un ovale et l'inscription ROMA. Ce magnifique papier est fabriqué dans les plus belles traditions du moulin Fabriano, datant du début de la fabrication de papier européen au XVe siècle. Ce papier fait main est particulièrement adapté pour les éditions de luxe et prisé des artistes pour les pastels, le fusain et le dessin. Il est neutre en termes de pH, ce qui garantit son inaltérabilité dans le temps et est exempt de chlore.
Imprimerie Nouvelle, Forcalquier s.d. (12 janvier 1946), 30,9x42,2cm, une feuille.
«On assiste depuis quelques mois à une chasse passive en règle des patriotes, trop bien notés, il semble, au temps où risquer sa vie et celle des siens n'était pas un article de devanture. L'odieux de cette façon d'agir est qu'elle rappelle étrangement les hitlériens. Déshonorer, ensuite on attend et on voit. Quelle que soit l'estime dont un être est entouré, une visite policière laisse toujours un relent d'équivoque,pense-t-on. Plus que jamais vigilance, solidarité.» (7 décembre 1945 (texte adressé par René Char à Francis Ponge) Édition originale de cette affiche mythique de « l'Affaire de Céreste » imprimée par René Char à quelques exemplaires et placardée dans le petit village de Céreste, cur de son réseau de résistance. D'une insigne rareté, cette affiche est absente de toutes les institutions et des salles de ventes. La BNF, elle-même, ne dispose que d'une reproduction offerte par Pierre-André Benoit. Ce célèbre placard marque la fin de la relation amoureuse et combattante entre René Char et le village de Céreste qui fut pourtant le Q.-G. du capitaine Alexandre, et le berceau d'une de ses plus émouvantes aventures amoureuses avec « la Renarde ». C'est en effet dans ce village isolé de Haute-Provence que René Char s'installe pour organiser son réseau de Résistance, la S.A.P. (Section Atterrissage Parachutage), chargée de récupérer les livraisons d'armes parachutées dans les Basses-Alpes et de les redistribuer aux maquisards. Fidèle hôte de Céreste depuis 1936, René Char put fédérer rapidement les villageois jusqu'aux gendarmes qui le protégeront et l'aideront à constituer son réseau. Avertis, les Allemands envoient une compagnie de S.S. à Céreste pour le débusquer, perquisitionnant toutes les maisons et interrogeant violemment les villageois qui tous connaissaient Char et son amante chez qui il logeait. La réaction héroïque des villageois marquera durablement René Char qui composa en leur honneur un des plus longs et beaux feuillets d'Hypnos : « Le village était assiégé, bâillonné, hypnotisé, mis dans l'impossibilité de bouger. Deux compagnies de SS et un détachement de miliciens le tenaient sous la gueule de leurs mitrailleuses et de leurs mortiers. Alors commença l'épreuve. Les habitants furent jetés hors des maisons et sommés de se rassembler sur la place centrale. [...] Marcelle était venue à mon volet me chuchoter l'alerte. [...] Des coups me parvenaient, ponctués d'injures. Les SS avaient surpris un jeune maçon qui revenait de relever des collets. Sa frayeur le désigna à leurs tortures. Une voix se penchait hurlante sur le corps tuméfié : « Où est-il ? Conduis-nous », suivie de silence. Et coups de pied et coups de crosse de pleuvoir. [...] Alors apparut jaillissant de chaque rue la marée des femmes, des enfants, des vieillards, se rendant au lieu de rassemblement, suivant un plan concerté. Ils se hâtaient sans hâte, ruisselant littéralement sur les SS, les paralysant « en toute bonne foi ». [...] Furieuse, la patrouille se fraya un chemin à travers la foule et porta ses pas plus loin. Avec une prudence infinie, maintenant des yeux anxieux et bons regardaient dans ma direction, passaient comme un jet de lampe sur ma fenêtre. Je me découvris à moitié et un sourire se détacha de ma pâleur. Je tenais à ces êtres par mille fils confiants dont pas un ne devait se rompre. J'ai aimé farouchement mes semblables cette journée-là, bien au-delà du sacrifice. » Une relation fusionnelle unit le poète à son village d'adoption et, dans le contexte de haine et de violence nazie, Céreste représente pour René Char le symbole vivant des valeurs humanistes à défendre et la nécessité de son combat. Cette passion trouvait son incarnation en son amante cérestoise : Marcelle Sidoine devient pour lui l'image même de Céreste, de ce nouveau pays dans lequel il creuse sa mine et entend enfouir les galeries d'où partira la reconquête. Elle est « l'âme de la montagne aux flancs profonds » écrit-il. Tout est dit. Elle sera l'amante, l'hôte, l'intendante, la messagère, l'agente de liaison. Une femme courage. » (René Char, Laurent Greilsamer) Marcelle sera aussi sa faiblesse, et la voie par laquelle, à la Libération, ses ennemis de l'intérieur régleront leur compte avec le trop célèbre capitaine. Puisqu'il est impossible de salir la réputation héroïque de Char, un traître de son réseau, Georges Dubois, dénoncé par Char et devenu journaliste d'un organe communiste, trouvera en Marcelle une cible parfaite pour accomplir sa vengeance. Accusée d'avoir détourné du linge à destination du maquis, Marcelle est salie par des rumeurs parfaitement orchestrées et voit sa maison perquisitionnée par la police. Le bien prétendument détourné s'avéra être au contraire une cargaison de chemises de nuit en laine, offertes par deux résistants marseillais, détricotées et transformées en pull pour les maquisards de la S.A.P. par Marcelle et sa fille Mireille. Bien que sa « Renarde » ait été entièrement blanchie par la justice, Char demeure profondément blessé par le succès qu'obtinrent les propos diffamatoires auprès des villageois. Son affiche est à la fois une ultime déclaration d'amour pour son « village glorieux » « qu['il] aime et que ces mauvais n'aiment pas » et une lettre de rupture avec un Céreste « déshonoré [...] par les grenouilles [...] ignobles ». Rompant avec les communistes, le résistant désabusé quittera également définitivement son village tant aimé, jusqu'à en éradiquer les traces dans la construction de ses Oeuvres complètes en 1983. Malgré l'insistance de Char, Marcelle et sa fille, que le poète voulait adopter, ne le suivront pourtant pas dans la vallée. Elles demeureront fidèles à leur village natal, tour à tour glorieux et ignoble, et finalement simplement humain. Impossible accord entre idéal et réalité, comme Char lui-même le pressentait déjà en 1945 : « N'était-ce pas le hasard qui m'avait choisi pour prince ce jour-là plutôt que le cur mûri pour moi de ce village. » - Photos sur www.Edition-originale.com -
L'Isle-sur-la-Sorgue 2 novembre 1947, 21x26,9cm, 1 page sur une feuille.
Lettre autographe signée de René Char de 11 lignes écrites à l'encre noire. Pliures inhérentes à l'envoi postal. René Char écrit cette lettre à René Wintzen, ancien rédacteur en chef de Documents,revue des questions allemandes. René Wintzen commence alors à faire paraître une revue littéraire, Vent debout, dont il a envoyé à Char un exemplaire. Le poète l'encourage et lui dit de persévérer tout en « discriminant le bon grain de l'ivraie ». René Char s'excuse de ne pas avoir de texte achevé à lui fournir : « je le regrette. J'écris peu et ne suis qu'accessoirement poète ! ». Cette mise en avant d'une écriture rare correspond à l'idée que René Char se fait de la poésie et qu'il oppose au travail prôné par Valéry. René Char écrit peu et se soumet aux exigences de la poésie : « Je ne triche jamais. Il m'est arrivé d'attendre six mois un mot ou une formule [...]. C'est l'exigence de la poésie. Une exigence absolue. Aucun mot n'est gratuit. » (entretien entre René Char et Édith Mora, Nouvelles littéraires, 1965). L'auteur montre également une distanciation vis-à-vis de la poésie en cette fin de décennie. En effet, Char expérimente alors des genres nouveaux : il s'essaie au ballet avec La Conjuration en avril 1947, mais aussi au théâtre avec Le Soleil des eaux, à la musique en compagnie de Boulez, et enfin au cinéma. Il ne quitte toutefois jamais la poésie et publie la même année Le Poème pulvérisé. La modestie de Char quant à son statut de poète exprime bien l'assujettissement de l'artiste à l'exigence de la poésie. - Photos sur www.Edition-originale.com -
Édition originale. Quatre aquatintes d'Alberto Giacometti. Tirage unique à 188 exemplaires sur vélin de Rives - celui-ci un des hors commerce, signé par René Char.Bel exemplaire, bien complet du feuillet volant imprimé mentionnant qu' "Alberto Giacometti est mort le 11 janvier 1966. Retour amont, achevé d'imprimer au moment de sa maladie, n'a pu être signé par lui". Jointe une photographie signée par René Char.Le dernier livre illustré par Giacometti. Paris, Guy Lévis-Mano, [décembre] 1965. 1 vol. (190 x 250 mm) de 58 p., 1 et [3] f. En feuilles, sous couverture à rabats, emboîtage toile grise éditeur, titré au dos. Édition originale. Quatre aquatintes d'Alberto Giacometti. Tirage unique à 188 exemplaires sur vélin de Rives — celui-ci un des hors commerce, signé par René Char. Bel exemplaire, bien complet du feuillet volant imprimé mentionnant qu' "Alberto Giacometti est mort le 11 janvier 1966. Retour amont, achevé d'imprimer au moment de sa maladie, n'a pu être signé par lui".
Retour amont contient quelques uns des beaux poèmes de Char de ces années soixante, dont beaucoup paraîtront - avant ou après cette édition - dans les tirages confidentiels publiés par PAB : Chérir Thouzon, Aux portes d'Aerea, Le Gaucher, Dansons aux baronnies, Lied de figuier, Faim rouge,... Tous rédigés aux Busclats, ils ont pour cadre les paysages et monts du Vaucluse. Les gravures de Giacometti, tirées par Crommelinck en négatif, furent les dernières que l'artiste composa. Familiers de la lithographie et de l'eau-forte - les premieres estampes realisees avec cette technique datent de 1946, dans le cadre des recherches pour l'illustration d'Histoire de rats de Georges Bataille -, Giacometti découvrit l'aquatinte plus tardivement et ce procédé est particulièrement adapté au souhait de René Char, « qui les trouvait ‘exactement dans l'esprit' des textes, [et qui] veilla à ce que les frères Crommelynck obtiennent au tirage un fond nettement et uniment noir et non pas d'un ‘gris délavé', comme il apparaissait aux premières épreuves [...] » (Antoine Coron, René Char, BnF,n p. 170). Ces « gravures en négatif - parmi les plus belles qu'il ait réalisées » furent en effet « ‘ses derniers mots avant qu'il ne parte conclure son destin dans son village des Grisons', selon l'expression de Char à Marcelle Mathieu ». Peu avant ce départ pour l'hôpital de Coire d'où il ne devait pas revenir, Giacommeti prévenait Char qu'il lui expédie "les quatre gravures (...) Ces quatre images se sont fixées dans ma tête, dessinées en blanc sur le fond sombre (c'est le fond qui est mordu à l'acide et pas les traits). Je ne sais pas si le résultat est bon, je n'ai en ce cas aucun jugement objectif, mais je ne peux pas ne pas te les envoyer. Si elles ne te vont pas, je vais faire autre chose, mais j'aimerais mieux avoir des gravures qui ont pour moi un rapport avec les poèmes que des gravures simplement parallèles comme on en fait généralement. Celles-ci seraient ordonnées dans une certaine suite. Devant le titre (frontispice) la montagne (la gravure avec le moins de traits que j'ai fait de ma vie), ensuite dans le livre : I - les hommes à cheval au galop (ils vont quelque part pour quelque massacre). II - l'homme dans les rochers. III - à la fin, l'homme sur le précipice qui regarde dans le vide avec le grand vide du paysage. J'ajoute une variante de l'homme dans les rochers, noire sur gris que je préfère en tant que gravure mais qui va moins bien devant un poème que le blanc sur noir" (Lettre à René Char, 26 septembre 1965). Giacometti est déjà gravement malade, mais a toujours négligé de se soigner. Les épreuves achevées, Il décide néanmoins de quitter Paris le 5 décembre, pour l'hôpital Cantonal de Coire (Canton des Grisons, dans les Alpes suisse). Une bronchite chronique transformée en pneumonie auront raison de son coeur : il décède un mois plus tard, avant d'être enterré le 15 janvier au cimetière de Borgonovo, son village natale de la vallée de Bregaglia, à une petite centaine de kilomètres de Coire, près de Saint-Moritz. Il ne pourra pas signer l'ouvrage, ni aucune épreuve des gravures. René Char, pour l'honorer, rédigera un "Célébrer Giacometti", qui sera intégré à l'édition définitive de Retour amont qui paraîtra, avec les textes seuls, l'année suivante aux Éditions Gallimard. A cette occasion, quelques poèmes auront subi des modifications, mais la structure du recueil resté identique, hormis l'ajout de ce "Célébrer Giacommetti" ; cet hommage sera repris comme texte principal du catalogue de l'exposition Giacometti à la Galerie Engelberts, à Genève, en 1967. Bel exemplaire, bien complet du feuillet volant imprimé mentionnant qu'"Alberto Giacometti est mort le 11 janvier 1966. Retour amont, achevé d'imprimer au moment de sa maladie, n'a pu être signé par lui".
Paris, Gallimard, 1951. 19 x 24, 53 pp., broché, bon état (couverture défraîchie).
"Vignettes dessinées par Louis Fernandez; N° 1883 sur 3250 exemplaires numérotés sur papier vélin Plumex Teka."
Paris, Gallimard, 1964. 14 x 21, 298 pp., broché, couverture rempliée, bon état.
"N° 971 sur 3500 exemplaires numérotés sur papier vélin bouffant Téka; préface de Georges Blin"
Paris, Gallimard, 1962. 14 x 21, 162 pp., broché, très bon état.
"Edition originale; service de presse."
Paris, Gallimard, 1975. 14 x 21, 46 pp., broché, très bon état.
N° 4578 sur 4800 exemplaires numérotés sur papier bouffant d'alfa Libert.
"Paris, Gallimard, 1966;" 14 x 21, 52 pp., broché, couverture rempliée, très bon état.
N° 2883 sur 3500 exemplaires numérotés sur papier bouffant d'alfa Calypso Libert.
Paris, Gallimard, 1949. 11 x 17, 109 pp., broché, bon état.
"Edition originale sur papier ordinaire; mention fictive de 2e édition."
Paris, Gallimard, 1953. 12 x 19, 32 pp., broché, non rogné, bon état.
"Edition originale sur papier ordinaire; mention fictive de 4e édition."
Paris, Gallimard, 1971. 14 x 21, 137 pp., broché, couverture rempliée, très bon état.
N° 4274 sur 4400 exemplaires numérotés sur papier bouffant alfa Libert.
Paris, Tchou, 1967. 8 x 12, 120 pp., reliure d'édition pleine toile, sous étui, bon état (étui défraîchi).
Frontispice d'après Picasso.
L'Isle-sur-la-Sorgue 19 mai 1953, 21x13,5cm, 2 pages sur une feuille.
Lettre autographe signée de René Char à René Wintzen de 9 lignes à l'encre noire. Pliure inhérente à l'envoi postal. Le correspondant de René Char est l'ancien rédacteur en chef de Documents,revue des questions allemandes, René Wintzen, et René Char lui confie « je lis régulièrement votre revue Documents ». René Wintzen publie depuis la fin de la guerre une revue, Vent debout. Il organise également des rencontres entres auteurs. René Char le remercie pour sa lettre et lui assure que ses sentiments pour lui sont restés sympathiques. Le poète lui fait part de sa défiance envers les journalistes : « On ne se montre hélas jamais assez méfiant à l'égard de la légèreté des journalistes, ces spécialistes parisiens des fausses situations ». Cette suspicion vis-à-vis des journalistes remonte à la fin de la guerre. René Char est alors célébré sous le nom de Capitaine Alexandre pour sa participation active à la Résistance. Au même moment, le journal communiste Rouge Midi, commence une campagne de calomnie en accusant le poète de libertinage et de détournement de marchandises. Ces accusations touchent René Char et sa colère augmente démesurément quand un des journalistes du Rouge Midi, Georges Dubois, est suspecté d'avoir commandité le meurtre de son compagnon de guerre Gabriel Besson. - Photos sur www.Edition-originale.com -
Paris, Tchou, 1967. 7 x 12, 120 pp., reliure d'édition pleine toile + étui, tête dorée, très bon état (sauf étui légèrement défraîchi).
"Edition partiellement originale; frontispice de Picasso."
ARTAUD Antonin, CHAR René, JOUVE Pierre-Jean, PALHAN Jean, et autres
Reference : 83635
Aix-en-Provence, L'Arc, 1960. 14 x 19, 106 pp., 10 planches en N/B, broché, non coupé, très bon état.
uvres de Bazaine, Gastaud, Grenier, Kijno, Manessier, Masson, Ubac, Vieira da Silva.
Paris, Gallimard, 1977. 14 x 20, 86 pp., broché, bon état.
" N° 688 sur 5250 exemplaires numérotés sur alfa bouffant Libert; collection blanche."
Paris, Librairie José Corti, 1954. 12 x 18, 113 pp., broché, bon état.
3e édition.
Précieux manuscrit, complet et unique, d'un des plus beaux recueils poétiques de René Char, offert à Anne Reinbold. Reliure souple en veau estampé de Louis Bescond. Les Busclats, 8 octobre 1968. 1 vol. (170 x 215 mm) 2 f., 38 p. et 3 f. Reliure souple à la Vernier en veau naturel teinté violet estampé d'une eau-forte originale composée à partir des pages manuscrites de l'auteur, tranches dorées sur témoins à l'or blanc par Jean-Luc Bongrain, gardes de chèvre velours violet, chemise et étui entièrement bordé assortis, titre à la chinoise sur la chemise au film crème, par Claude Ribal (reliure signée de Louise Bescond, 2022). Précieux manuscrit offert à Anne Reinbold, et daté « Les Busclats 8 octobre 1968 – Pour Anne, Anne ma présente. René Char ». Les poèmes occupent 18 feuillets manuscrits numérotés 1 à 14 comportant un faux-titre, un titre, « Dans la nuit… », les poèmes « Crible », « Outrage », « Encart », « Les apparitions dédaignées », « Même si… », « Le Baiser », le texte « En cette fin des Temps… » et un feuillet de date et d’envoi. À la suite, a été relié le jeu d’épreuves définitif et le bon à tirer, signé et daté par l’auteur « Épreuves. Bon à tirer. R.C. Nov. 69 », soit 20 feuillets imprimés. René Char y a apporté des corrections d’ordre typographique et deux variantes aux poèmes « Les Apparitions » et « Même si… ». Enfin les deux vers de la dernière page des épreuves : « Maintenant que nous sommes délivrés de l’espérance et que la veillée fraîchit » ont été biffés.
Ce manuscrit autographe est le seul connu du texte : il existe du Chien de coeur un ensemble « de travail » (Artcurial, mars 2014, n° 333), en partie d'une autre main ou sur feuillets dactylographiés - Char étant encore alité au début de l'été lorsqu'il entreprend l'écriture des premiers poèmes, tous composés entre juin et août à l'exception d'« Outrages », composés par bribes entre 1944 et 1967. Notre manuscrit est à l'évidence la version mise au propre de ce jeu de travail, composite et rédigé dans l'intention de constituer les épreuves à venir. Il présente d'importantes variantes par rapport à l'édition qui sera imprimée chez Guy Levis-Mano en janvier 1969. Six mois plus tôt, en mai 1968, à l'écart des événements qui secouent la France, René Char fait une crise cardiaque, première d'une longue série d'accidents cardiovasculaires. Il évoque cette « expérience » dans le texte liminaire qui ouvre le recueil : « Dans la nuit du 3 au 4 mai 1968, la foudre que j'avais si souvent regardée avec envie dans le ciel éclata dans ma tête, m'offrant sur un fond de ténèbres propres à moi le visage aérien de l'éclair emprunté à l'orage le plus matériel qui fut. Je crus que la mort venait, mais une mort où, comblé par une compréhension sans exemple, j'aurais encore un pas à faire avant de m'endormir, d'être rendu éparpillé à l'univers pour toujours. Le chien de coeur n'avait pas geint. » Le recueil donne ensuite à lire six poèmes, tous composés pendant l'été, aux Busclats, juste avant l'arrivée de Martin Heidegger qui sera accueilli par René Char fin août. René Char et Anne Reinbold habitaient ensemble dans la propriété de 1965 à 1985. L'exemplaire contient en fin, dans les épreuves, quelques corrections, principalement d'ordre typographiques, et de légères variantes au texte ; un paragraphe prévu pour clore le recueil est également biffé, et qui n'apparaîtra pas dans le volume imprimé : « Maintenant que nous sommes délivrés de l'espérance et que la veillée fraîchit » : ces vers sont d'importance, puisque Char les conservera pour les intégrer dans son dernier recueil, Les Voisinages de Van Gogh (1985), enrichi d'un vers supplémentaire : « Maintenant que nous sommes délivrés de l'espérance et que la veillée fraîchit, nul champ sanglant derrière nous, tel celui que laisserait un chirurgien peu scrupuleux, au final de son ouvrage. » Ce poème viendra clore le recueil et constitue le tout dernier vers publié de Char, quelques mois avant sa mort. Vingt-cinq plus tôt, le poète avait décidé de ne pas les conserver pour clore Le Chien de coeur. L'heure n'était, en 1968, pas venue... Le tirage du Chien de coeur se limite, pour les exemplaires sans la lithographie originale de Miro, à 790 exemplaires sur offset Roberstsau. Le tirage numéroté avec une lithographie en couleurs de Joan Miró, signée, constitue le tirage de tête : 95 exemplaires sur vélin d'Arches et six exemplaires sur vélin gris (I à VI) ; il existe en outre 15 exemplaires hors commerce sur divers papiers colorés : 7 vergé rose (A à G) et 8 sur vélin vert (H à O). Magnifique manuscrit préservé dans une délicate reliure de Louise Bescond, en veau teinté et estampé d'après les poèmes autographes du poète.
Céreste, (octobre) 1944. 2 tirages argentiques noir et blanc (11,5 x 70 mm) contrecollés sur 1 carte (130 x 160 mm). Deux tirages originaux, légendés par René Char, au milieu des habitants de Céreste. Envoi signé au verso : « À Max-Pol Fouchet, affectueusement, René Char », avec note autographe « Céreste, basse Alpes, à la Libération, Été 1944 (retour d'Alger). »
Le premier cliché présente René Char en blouson américain Field Jacket M-41 orné des galons de capitaine et d'un insigne en tissu de parachutiste de la R.A.F. en compagnie des Ginoux, le cantonnier du village et sa mère à laquelle, « craignant une perquisition, [il] demanda un jour [...] de cacher des codes et autres documents importants sous ses jupons » (René Char, Bibliothèque nationale, p. 76). Le poète l'a légendé de sa main : « ces trois-là se comprenaient... » L'autre photographie, prise le même jour et toujours à Céreste, le présente sous le même uniforme, parmi un groupe de villageois et de quelques gendarmes avec cette autre légende, toujours de sa main : « un rocher de braves gens ». La jeune fille qui porte une robe à carreaux et se tient au premier rang est Mireille Sidoine, la fille, âgée de onze ans, de Marcelle Sidoine-Pons, la « renarde » des Feuillets d'Hypnos en son poème 222. René Char vient de rentrer d'Alger, où il avait été appelé le 15 juillet par l'état-major interallié pour préparer le débarquement de Provence qu'il regagne en septembre, affecté au bureau liquidateur de la Section des atterrissages et des parachutages (Sap). Ces clichés sont pris par Irisson, le photographe ami de Char, dans le but de tourner un film documentaire sur la Sap et le maquis de Céreste qui n'aboutira pas. D'autres épreuves sont connues, Irisson en ayant tiré plusieurs autres à partir de 1945, dans des formats plus grands (100 x 170 et 120 x 180 mm), mais elles sont postérieures aux épreuves strictement d'époque, comme celles que nous présentons ici, plus petites. Ces photographies auront probablement été offertes par René Char à Max-Pol Fouchet, en même temps que son portrait dédicacé (cf. n° 74), au moment où il prépare la publication de ses Feuillets d'Hypnos dont des extraits paraîtront dans Fontaine.
Belle provenance éditoriale pour la première collaboration de René Char et Georges Braque, alors que le poète a repris ses publications depuis 1945 aux éditions Gallimard, avec Seuls demeurent et Les Feuillets d'Hypnos. La reliure est signée de Danielle Mitterrand, qui fut formée à l'art du janséniste par Miguet. Avec une certaine réussite. Paris, H. Matarasso, (14 avril) 1949. 1 vol. (220 x 280 mm) de 146 p. et [1] f. Maroquin vert tendre, dos lisse tire doré, contreplats et gardes chèvre velours orange, couvertures et dos conservés, chemise et étui bordés (Reliure signée de D. Mitterrand). Édition originale. 4 eaux-fortes, dont 1 en couleur, par Georges Braque. Un des 170 exemplaires sur vélin du Marais, signé par Braque et Char (n° 67). Envoi signé : "À Gaston Gallimard, en pensée amicale cette histoire, cette enfance autour du cœur et sous les yeux transparents. René Char ".
C'est avec Le Soleil des eaux que s'inaugure la particulièrement importante collaboration de René Char et Georges Braque. Il a été publié peu de temps après leur rencontre lors d'une exposition de peintures et de sculptures contemporaines organisée par Christian et Yvonne Zervos au Palais des Papes en Avignon. L'un des rares textes de ce dernier où il se prête à une mise en scène, plus cinématographique que théâtrale cependant, puisque la plupart des situations se déroulent dans des cadres naturels : et pour cause, puisque le projet fut d'abord bel et bien cinématographique. René Char rédigea le scénario d'août à octobre 1946 : il raconte l'histoire d'une communauté de pêcheurs au début du siècle, en Provence, dans le Comtat Venaissin. L'implantation d'une usine au bord de la rivière Crillone qui baigne le petit village de Saint-Laurent déclenche une révolte parmi les pêcheurs de truites et d'anguilles, confrontés à la pollution de leur rivière par les rejets de chlore de cette papeterie. Comment concilier le bonheur agreste et la technique dévastatrice ? Le lieu prévu du tournage était L'Isle-sur-la-Sorgue, où devaient être recrutés bon nombre de figurants. Ce serait, dit-il « un film dont l'ambition est de faire oublier qu'il est un film, c'est-à-dire un peu plus qu'une nourriture pour les yeux : une preuve pour le coeur », qu'il souhaite partager avec Jean Vilar, à qui il avait pensé pour tenir un des rôles et à qui il écrit le 12 décembre : « Il serait urgent que je vous voie [...] J'ai écrit le scénario et les dialogues d'un film qui sera tourné au printemps dans des conditions sérieuses. » Yvonne Zervos, directrice de la galerie des Cahiers d'art, est contactée pour financer le projet ; un contrat est signé avec la société Sifdac de Serge Sandberg en février 1947. Sans expérience de la réalisation, René Char fit appel à quatre metteurs en scène successifs, qu'il se chargerait de « superviser ». Mais face aux conditions difficiles (dont la grande grève de 1947), les financiers se retirèrent et seuls quelques plans furent tournés. Char se tourne alors vers la scène : le spectacle sera créé en 1948 par la Radiodiffusion française sur une musique de Pierre Boulez et dans une réalisation d'Alain Trutat. La rencontre avec Braque, l'année suivante, donne enfin corps au projet d'une édition illustrée. C'est pour ce livre que le peintre inaugure le célèbre motif de l'oiseau ouvert, qu'il a exécuté trois planches en noir et une planche frontispice en couleurs. Les quelques textes de René Char destinés à la scène seront réunis plus tard sous le titre : Trois coups sous les arbres. Provenance : Vente "Surréalisme", Binoche-Renaud-Giquello, Paris, 27 mars 2009, Claude Oterelo exp., n° 66 ; collection privée.