ABEILLE Louis-Paul ; BIGOT DE SAINTE CROIX Louis Claude ; GALIANI Ferdinando.
Reference : 980
(1768)
Amsterdam & Paris, Desaint, 1768. Cinq ouvrages en un volume in-8 (195 x 124 mm), IV pp., 162 pp., 3 tables dépl.; 48 pp.(interversion du texte avec le quatrième ouvrage à partir du cahier C); 8 pp.; 8 pp.; un tableau dépl., 147 pp. et 1 p. n. ch.; 2 ff. n. ch., 314 pp., 1 f. n. ch. Veau porphyre, triple filet doré en encadrement sur les plats, dos à nerfs orné de caissons avec pièce d'armes au cerf doré répété, pièces de titre vert foncé et rouge, coupes filetées, tranches marbrées, habiles restaurations (reliure de l’époque).
Réunion de 5 rares et importants ouvrages sur le commerce à la fin du règne de Louis XV, tous en édition originale: -Louis-Paul Abeille. Principes sur la liberté du commerce des grains. Juillet 1768. Amsterdam & Paris, Desaint, 1768. -[Louis Claude Bigot de Sainte-Croix]. Avis du Parlement de Dauphiné sur la libre circulation des Grains et la réduction naturelle des prix dans les années de cherté. [Grenoble], 1769. -Jean-Baptiste des Gallois La Tour. Lettre écrite à M. le Contrôleur-Général, le 8 Juillet 1768, par M. de La Tour, premier Président du Parlement de Provence; en double. -Louis-Paul Abeille. Faits qui ont influé sur la cherté des grains en France & en Angleterre. 1768. -Ferdinando Galiani. Dialogues sur le commerce des bleds. Londres [Paris], 1770. Un vif débat sur la libéralisation de l’économie. Strictement contrôlé par l’État depuis le XVIe siècle, le commerce du grain fut progressivement libéralisé dans le royaume à partir des années 1763-1764. Ces réformes furent favorablement accueillies par les philosophes progressistes et les physiocrates, opposés aux monopoles et aux corporatismes. Mais la spéculation induite, associée à de mauvaises récoltes, entraîna une forte augmentation du prix du pain, des famines et des révoltes, obligeant l’État à reprendre progressivement la main sur les prix entre 1768 et 1770. Cette situation instable alimenta un vif débat parmi les économistes de l’époque. Dans les Principes sur la liberté du commerce des grains, Louis-Paul Abeille (1719-1807), inspecteur général des manufactures et secrétaire général du Bureau du Commerce, plaide pour l’abolition de toutes les lois prohibitives en fait de commerce. La même année, ce physiocrate convaincu exposait les Faits qui ont influé sur la cherté des grains, en attaquant déjà le monopole et la spéculation. Ces deux ouvrages définissent la position d’Abeille, qui avait l’oreille du contrôleur général des finances Maynon d’Invault. En 1769, tandis que les Parlements de province prenaient position sur le débat qui faisait rage, le Parlement du Dauphiné rendit un Avis qui était une exposition magistrale de la doctrine physiocratique. «Cet ouvrage est devenu bientôt excessivement rare, parce que le système qu’on propose à Sa Majesté est totalement opposé à ce que les Parlements de Paris et de Rouen ont écrit sur cette matière» note Bachaumont dans ses Mémoires secrets. Le Parlement de Paris tenta en effet de le faire disparaître, sans pouvoir effacer l’influence qu’il exerça sur l’opinion. Le libre commerce du grain est cependant mis à mal dans les Dialogues sur le commerce des bleds, ouvrage majeur de l’économiste italien Ferdinando Galiani (1728-1787). Beau parleur et curieux de tout, familier du salon de Mme d’Épinay et de la société du baron d’Holbach, il avait su convaincre Diderot qui aurait revu, publié et défendu son traité. Voltaire a évoqué le débat et l’ouvrage de Galiani dans son Dictionnaire philosophique, à l’article «Blé»: «M. l’Abbé Galiani, Napolitain, réjouit la nation Française sur l’exportation des blés; il trouva le secret de faire, même en français, des Dialogues aussi amusants que nos meilleurs romans et aussi instructifs que nos meilleurs livres sérieux. Si cet ouvrage ne fit pas diminuer le prix du pain, il donna beaucoup de plaisir à la nation, ce qui vaut beaucoup mieux pour elle.» Exemplaire aux pièces d’armes de l’intendant des finances Philibert Trudaine de Montigny (Clermont-Ferrand, 1733-Paris, 1777). Fils de Daniel-Charles Trudaine, intendant des finances et directeur du département des Ponts et Chaussées, il collabora avec son père dès 1757 et lui succéda à sa mort en 1769. Ami des Physiocrates, défenseur des libertés économiques, Philibert Trudaine était également un chimiste réputé, membre de l’Académie des sciences, et un mécène pour les savants. À Montigny, il avait fait aménager un laboratoire et recevait ses amis Malesherbes, Turgot, Montesquieu, Diderot, Lavoisier, Clairaut, etc. «Trudaine, dont les connaissances étaient très étendues et qui recherchait l’amitié et la société des savants et des gens de lettres, projetait de se consacrer à des recherches sur la physique et la chimie quand le mort le surprit. Sa bibliothèque, augmentée de celle de son père, fut vendue après son décès» (Olivier, Hermal et de Roton). Elle passa en réalité à son fils Charles-Louis Trudaine, ami de Chénier guillotiné comme lui en 1794, avant d’être dispersée en 1801. Cet exemplaire figure sous le n°196 du catalogue de la vente. Il fut vraisemblablement acquis par le fermier général Adrien Charles Saulot de Bospin, administrateur des domaines du roi avant la Révolution, dont l’ex-libris figure au premier contreplat. Sa bibliothèque fut vendue en 1804. Très intéressant recueil, en reliure de l’époque. The Kress library of business and economics, I, n°6512, 6513 et 6730. O. H. R., Manuel de l’amateur de reliures armoriées, pl. 1195. Suzanne Delorme, «Une famille de grands Commis de l’État, amis des Sciences, au XVIIIe siècle: Les Trudaine», Revue d’histoire des sciences, 1950, t. III, n°2, pp. 101-109. Catalogue des livres de la bibliothèque de feu Charles-Louis Trudaine l’aîné, Bleuet, 1801, n°196.