Amsterdam, Mortier, 1697. 1697 1 vol. in-12° (157 x 92 mm) de: [8] ff. (titre en rouge et noir, vignette gravée et collée sur la page de titre: «Misericordia et Institia», épître, avertissement, table); 251 pp. (dont 1 gravure dans le texte répétée en tête de chapitre) ; [13] pp. (table); 6 planches dépliantes; bandeaux, lettrines et culs de lampe. (Quelques mouillures, rousseurs et défauts d'usage, déchirure à la p. 11, galerie de vers discrètement comblée dans la marge inférieure sur les 10 derniers ff. avec perte de quelques lettres). Pleine basane d'époque, dos à nerfs orné, roulette dorée sur les coupes, tranches jaspées rouges. (Petits défauts dusage).
Reference : 4959
Jolie et rare édition d'Amsterdam avec titre en rouge et noir de cette célèbre dénonciation de l'inquisition due à Charles Dellon, texte qui fut condamné et mis à l'index en 1690 (Edition pirate : Leyde, 1687 ; E.O.: Paris, 1688). Charles Dellon (1649-1709), né à Agde dans un milieu de petite bourgeoisie marchande catholique, s'embarque à dix-sept ans pour les Indes Orientales sur un vaisseau de la Compagnie du même nom. Il allait chercher fortune comme médecin, quoiqu'il n'ait pas le titre. A la suite de nombreuses péripéties, il s'établit en mars 1673 à Daman, l'un des comptoirs portugais de la côte occidentale de la péninsule indienne. En août, il est arrêté par le commissaire local de l'inquisition et transféré au Saint Office de Goa pour y être jugé. Dellon est accusé de nier le sacrement du baptême et davoir blasphémé contre ladoration dun crucifix (davoir refusé dadorer un crucifix), mais surtout de remettre en cause lInquisition. Il fut excommunié et fut penitencié lors de l'autodafé du 12 janvier 1676, condamné à la confiscation de ses biens et à cinq ans de galères, exécutables au Portugal. Transporté à Lisbonne, il est libéré peu après, sur intervention diplomatique française obtenue par l'intermédiaire de Jacques-Bénigne Bossuet (1627-1704 ; homme d'Église, évêque, prédicateur et écrivain français). De retour, Dellon passe son doctorat en médecine et entre au service des princes de Conti, qu'il suit à la guerre en Hongrie (1685). Installé à Paris, il consacre son temps à lécriture. En 1685, il publie sa Relation d'un voyage des Indes orientales quil dédie à son libérateur, Bossuet, ainsi que son Traité des maladies particulières aux pays orientaux, et dans la route, et de leurs remèdes, qui lui vaudra une place dans l'histoire de la médecine tropicale. Cependant, La Relation de l'Inquisition de Goa (1687) reste son grand uvre. Dellon y conte les quatre terribles années de captivité passées aux mains de l'Inquisition portugaise en Indes Orientales ainsi que son procès. Dellon, on s'en doute, n'aime pas l'Inquisition. Il se livre même à l'une des dénonciations les plus fortes, car des mieux informées, qui en ait été faite. Son uvre est une arme. Arme de Louis XIV contre la papauté en 1688, alors que la tension entre Paris et Rome est vive ; arme des protestants contre l'Église catholique ; arme des Lumières contre l'Église tout court. Par la comparaison des récits que donne Dellon avec les papiers conservés des inquisitions de Goa et d'Evora, ainsi que ceux du Conseil de l'Inquisition à Lisbonne, ils montrent que non seulement il a bien vécu les péripéties qu'il s'attribue, mais encore que son information est d'une grande précision. La Relation est bel et bien un témoignage de première main, le récit d'un témoin oculaire, de l'intérieur, sur le fonctionnement d'un tribunal d'Inquisition. Il convient d'insister sur la rareté des textes de ce genre: les accusés de l'Inquisition étaient sommés, à l'issue de leur procès, de garder le silence sur ce qu'ils avaient vécu au tribunal. La plupart d'entre eux l'ont fait, ou du moins n'ont pas laissé de témoignage écrit. On dispose d'une dizaine d'ouvrages au total, tous évidemment publiés en dehors des territoires soumis à la juridiction du tribunal. Le présent ouvrage jouera un rôle capital dans le combat contre l'intolérance à l'époque des Lumières. Voltaire s'en inspirera dans Candide, mais également Bayle, Limborch, Lesage, Montesquieu, le marquis d'Argens, d'Alembert, l'abbé Morellet, Beccaria, Buchanan, sans oublier la presse qui se servit de ce témoignage au parfum de roman d'aventure doublé d'un redoutable pamphlet politique et religieux. Lillustration se compose de 6 planches dépliantes retraçant les étapes du jugement de l'Inquisition dont une terrible scène de suppliciés mis au bûcher. Rare ouvrage dont on dénombre seulement 3 exemplaires passés en vente ces 100 dernières années. 1 vol. 12mo (157 x 92 mm) of : [8] ff. (title, engraved vignette pasted on the title page : "Misericordia et Institia", epistle, warning, table) ; 251 pp. (including 1 engraving in the text repeated at the head of the chapter); [13] pp. (table); 6 folding plates; bands, lettering and lamp-ends. (Some wetness, foxing and wear, tear on p. 11, wormhole discreetly filled in the lower margin on the last 10 ff. with loss of some letters). Full contemporary basane, spine ribbed and decorated, gilt roulette on the edges, red speckled edges. (Small defects of use). Nice Amsterdam edition of this famous denunciation of the inquisition by Charles Dellon, a text that was condemned and put on the index in 1690 (Pirate edition: Leiden, 1687; E.O.: Paris, 1688). Charles Dellon (1649-1709), born in Agde into a middle-class Catholic merchant family, embarked at the age of seventeen for the East Indies on a vessel of the Company of the same name. He was going to seek his fortune as a doctor, although he did not have the title. After many adventures, he settled in March 1673 in Daman, one of the Portuguese trading posts on the west coast of the Indian peninsula. In August, he was arrested by the local commissioner of the inquisition and transferred to the Holy Office in Goa to be tried. Dellon was accused of denying the sacrament of baptism and of blaspheming against the worship of a crucifix, but above all of questioning the Inquisition. He was excommunicated and was penitentiated during the autodafé of January 12, 1676, condemned to the confiscation of his goods and to five years of galleys, executable in Portugal. Transported to Lisbon, he was freed shortly afterwards, thanks to a French diplomatic intervention obtained through Jacques-Bénigne Bossuet (1627-1704; French churchman, bishop, preacher and writer). On his return, Dellon received his doctorate in medicine and entered the service of the princes of Conti, whom he followed to war in Hungary (1685). Settled in Paris, he devoted his time to writing. In 1685, he published his "Relation d'un voyage des Indes orientales" which he dedicated to "his liberator", Bossuet, as well as his "Traité des maladies particulières aux pays orientaux, et dans la route, et de leurs remèdes", which will earn him a place in the history of tropical medicine. However, "La Relation de l'Inquisition de Goa" (1687) remains his great work. In it, Dellon recounts the four terrible years of captivity spent at the hands of the Portuguese Inquisition in the East Indies as well as his trial. Dellon, as one can imagine, does not like the Inquisition. He even makes one of the strongest and most informed denunciations of it. His work is a weapon. A weapon of Louis XIV against the papacy in 1688, when tensions between Paris and Rome were high; a weapon of the Protestants against the Catholic Church and a weapon of the Enlightenment against the Church itself. By comparing the accounts that Dellon gives with the preserved papers of the inquisitions of Goa and Evora, as well as those of the Council of the Inquisition in Lisbon, they show that not only did he live through the events that he attributes to himself, but also that his information is of great precision. The Relation is indeed a first-hand account, an eyewitness account, from the inside, of the workings of an Inquisition tribunal. It is worth emphasizing the rarity of texts of this kind: the accused of the Inquisition were ordered, at the end of their trial, to keep silent about what they had experienced in court. Most of them did so, or at least did not leave any written testimony. There are about ten books in total, all obviously published outside the territories subject to the jurisdiction of the tribunal. The present work has played a capital role in the fight against intolerance during the Enlightenment. Voltaire was inspired by it in Candide, but also Bayle, Limborch, Lesage, Montesquieu, the Marquis d'Argens, d'Alembert, the Abbé Morellet, Beccaria, Buchanan, without forgetting the press which used this testimony with the perfume of an adventure novel doubled with a formidable political and religious pamphlet. The illustration is composed of 6 folding plates retracing the stages of the Inquisition's judgment, including a terrible scene of tortured people being burned at the stake. Rare work of which only 3 copies have been sold in the last 100 years.
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