‎APOLLINAIRE (Guillaume)‎
‎Lettre à Louise de Coligny-Châtillon‎

‎ Nîmes, 26 décembre 1914. 4 pages en 2 f. (135 x 215 mm) au crayon, sur papier à en-tête "Gd Hotel du Midi & de la Poste. Nîmes". Belle et rare lettre des débuts de la relation entre Apollinaire et Louise de Coligny-Châtillon. C'est la première des réponses écrite par le poète après leur première semaine amoureuse passée ensemble, à Nîmes, en décembre 1914. L'aventure, brève, est passionnée et intense. ‎

Reference : 30427


‎À l’été 1914, le poète souhaite s’engager au sein des forces armées dès l’ordre de mobili-sation générale du 2 août. Mais, faute de nationalité française, le conseil de révision ajourne sa demande. Apollinaire, en proie au plus grand désarroi, accepte alors l’invitation de son ami Siegler-Pascal de le rejoindre à Nice. Fin septembre, il y rencontre Louise : « Vingt-quatre heures se sont à peine écoulées depuis cet événement que déjà l’amour m’abaisse et m’exalte tour à tour si bas et si haut que je me demande si j’ai vraiment aimé jusqu’ici » (Lettres à Lou, 28 septembre 1914). Début de la romance, et des échanges. Deux mois plus tard, le 5 décembre, Apollinaire réussit enfin à se faire incorporer au 38e régiment d’artillerie de campagne de Nîmes. Mais dès le lendemain, sans prévenir, Lou l’attend devant les grilles de la caserne de la route d’Uzès : s’ensuivent dix jours d’idylle à l’Hôtel du Midi, situé square de la Couronne, où « ils s’échangent des serments et des gages – une mèche de cheveux, une chaîne ornée de médailles. Il en oublie la souffrance qui hantait le souvenir de ses amours passées. Il en oublie la guerre qui finira par le vaincre. Il en oublie la séparation lointaine, irrémédiable. » (Laurence Campa, « Guillaume Apollinaire entre amour et souvenir » in Balade dans le Gard, Sur le pas des écrivains, Ed. Alexandrines). Laquelle survient le 16 décembre, lorsque Lou doit regagner Nice. C’est à cette date que débute réellement l’une des correspondances amoureuses les plus mythiques de la littérature du XXe siècle. Apollinaire lui écrit et lui envoie, dès le 17 décembre, le poème « Je pense à toi mon Lou », puis une autre lettre le 20, puis une autre le 23, encore une autre le 24. Avec la promesse de retarder de se porter volontaire pour le front – ce qu’il fera finalement fin mars 1915, après leur rupture. Notre lettre est la cinquième envoyée depuis le départ de Lou, et la première écrite après qu’Apollinaire reçoit réponse aux premières. Il s’était plaint dans celle du 24 : « Pourquoi n’écris-tu pas ? C’est insensé de me laisser ainsi sans nouvelles. J’en ai les nerfs malades. Finalement j’aurai ma permission pour Nice et elle sera de 48 heures sur lesquelles beaucoup seront consacrées au voyage. Je te télégraphierai tout à l’heure. Mais toi, Lou, écris-moi, dis-moi ce qu’il y a, ce qui se passe, ne me laisse pas inquiet. Il y avait ce soir au courrier 42 lettres pour moi. J’ai paraît-il battu le record de tous les régiments de Nîmes où se trouvent en ce moment 17 000 hommes. Mais parmi ces 42 lettres pas une de mon Lou, mon Lou m’oublie. Mon Lou ne songe pas qu’il me rend malheureux. » Le bonheur arrive donc le surlendemain, et Apollinaire retrouve le sourire : « Chéri, aujourd’hui 2 lettres de toi […] Tu penses si je suis content. Quartier libre encore mais comme il faut revenir à 3 h. pour l’abreuvoir, je n’ai pas osé demander la permission de la botte l’ayant eue hier et comptant la demander demain. Je te télégraphierai l’heure de mon arrivée à Nice. […] on peut avoir ici de bonnes chambres à 20 fr. par mois »… Mais les nouvelles ne sont « pas bonnes. Un brigadier qui a sa femme à Compiègne a dit qu’elle lui a écrit qu’on allait évacuer cette ville. Et Compiègne prise, c’est Paris menacé, investi peut-être et alors adieu projets charmants, argent à venir ! Ma chérie, moi je t’adore chaque minute davantage. Ta dépêche d’hier a été pour moi un bonheur exquis. Oui ! mon Noël c’est ton amour et ta dépêche t’amenait si près de moi que je l’ai baisée mille fois. Je ne m’étonne pas que tu ailles prier Dieu à l’église. Toutes les grandes questions, a dit Donoso-Cortes (si ce ne sont pas les propres termes c’est du moins le sens), toutes les grandes questions, toutes les grandes choses, vont à la théologie ou en viennent. Rien d’étonnant que notre amour, la plus grande chose que nous connaissions, ma chérie, aille vers Dieu. […] Oui chérie j’ai eu le plus beau Noël possible – ton amour ! Chérie, je tiendrai toutes les promesses que je t’ai faites. Non, je ne te demande pas de me relever et je ne veux en rien jamais te faire de peine. J’ai du courage pour tout, sauf pour tout ce qui pourrait te menacer toi et notre amour ». Son secrétaire Jean Mollet s’est montré sceptique quant à son amour : « J’ai bien ri et l’ai engueulé dans ma réponse. Ce brave imbécile a vraiment une mauvaise opinion de moi. Mais je ne peux lui expliquer toute la force de cet amour qui est pour moi plus que le ciel, ma toute chérie ». Il parle ensuite d’Eugène Montfort, dont la revue Les Marges avait été en partie financée par le mari allemand de Marie Laurencin : « il ne parle que de pourfendre les Boches après avoir mendié leur argent puisqu’il avait beaucoup d’actionnaires allemands, Kessler entre autres, et que moi dans ma revue Les Soirées de Paris, je n’ai jamais voulu d’argent allemand, sauf des abonnés, car on ne peut empêcher quelqu’un de s’abonner à une revue ». Il ajoute qu’il a visité la Maison Carrée, et le musée de Nîmes, « pour y voir l’original du portrait de Lucrèce Borgia dont la reproduction ornait mon livre La Rome des Borgia paru en 1913 et qui a eu beaucoup de succès ». Et il termine : « Je t’aime de toutes mes forces, de toute mon âme, de tout mon cœur, de tout mon être. Il fait un froid de chien. Je t’embrasse partout et mords tes lèvres. Tu fais le lézard au soleil, belle indolente ». Les deux amants se revoient pour le Nouvel An, puis fin janvier, enfin une dernière fois, brève, en mars. Les dix jours nîmois seront les plus longs moments passés ensemble. Les Poèmes à Lou seront publiés pour la première fois en 1947 par l’éditeur genevois Pierre Cailler, sous le titre Ombre de mon amour. ‎

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‎APOLLINAIRE (Guillaume) poète et écrivain français (1880-1918) ‎

Reference : 56C29

‎Lettre autographe signée « Gui » à la comtesse Louise de Coligny-Châtillon, « Lou ». Châlons sur Marne, le 5 avril 1915. 1 pp-12, d’une petite écriture. Adresse au verso. Envoi du 1er canonnier-conducteur ; G. de Kostrowitzky. 38ème régiment d’Art. Nîmes. Gard.‎

‎Après avoir patienté plusieurs heures dans la Salle d’attente de Châlons, il annonce à son « Petit Lou », son départ dès le lendemain pour Mourmelon. « C’est décidément notre destination. Je sais pas encore si c’est Mourmelon le Petit ou Mourmelon le Grand. Mais l’un et l’autre sont près de Reims. Nous n’avons connu notre vraie destination que ce soir. Traversé pays désolé depuis Troyes. De grandes batailles ont eu lieu là. Des voyageurs, gens du pays nous les ont racontées. Des choses extraordinaires. Des saouleries impardonnables ont retardé la victoire. Il n’y a pas que les officiers boches qui ont bu trop de champagne. Les villages n’existent plus. C’est fantastique mais j’ai confiance Si les intrigues contre Joffre ne réussissent pas, je crois qu’il nous donne la certitude de la victoire. Je t’embrasse fort fort fort. ».‎


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