S.l.n.d., , (1731 circa). Manuscrit in-8 calligraphié de (24) ff., texte encadré, maroquin rouge, dos lisse orné, titre doré en long sur le dos : Chansons manuscrites du Père Girard, filets d’encadrement dorés sur les plats, frise intérieure (Purgold).
Reference : 42632
Précieux chansonnier consacré à l'affaire célèbre qui opposa la famille d'une jeune convulsionnaire illuminée, Catherine Cadière, à son confesseur, le père jésuite Jean-Baptiste Girard, Contient : Chanson sur l’air La Faridondaine ; Autre sur l’air Monsieur le Prevost des Marchands ; Autre sur l’air Or écoutez petits et grands ; Grace à la poudre de Chilly ; Cadière ce monstre nouveau ; Parodie de la lettre écrite le 22 juillet 1730 par le Père Girard à la Demoiselle Cadière ; Sur l’air que je regrette mon amant ; Autre Sur l’air de Joconde ; Sonnet c’est Madelle Cadière qui parle ; Chanson sur le Père Girard et Mlle Cadière ; Autre Si le devoir de mon saint ministère ; Imprécations contre le Parquet du Parlement d’Aix ; Épigramme La Guerre s’allumait souvent ; Autre oraison nouvelle courte et facile Dieu garde nos roys des Guignards et nos filles de Girard.« L’affaire Girard-Cadière commence en 1728, quand le père Jean-Baptiste Girard (1680-1733), jésuite, arrive à Toulon, où il est nommé recteur du Séminaire Royal de la Marine. Les sermons de cet homme du Nord, précédé d'une grande réputation à Aix et à Marseille , attirent de nombreuses dévotes, qui composent le cercle des « girardines ». Il est rapidement soupçonné d'entretenir des relations charnelles avec une de ses pénitentes, Catherine Cadière, alors âgée de 19 ans, fort dévote et piquée de sainteté. Il est question d'avortement, de sorcellerie, de convulsions et le fait divers tourne rapidement à la controverse religieuse entre jésuites et jansénistes. Le procès se déroule au Parlement d'Aix-en-Provence en 1731. C'est pendant cette année que le retentissement de l'affaire est le plus important : factums, chansons, gazettes s'en font l'écho de façon complaisante ou polémique. On en parle à la cour et dans toute l'Europe. La tension retombe après le double acquittement prononcé par les magistrats aixois, le 10 octobre 1731, mais l'affaire ne cesse d'inspirer les auteurs les plus variés (…) Les pièces satiriques sur l'affaire Girard-Cadière s'inscrivent dans la tradition des vers satiriques et des chansons, qui, depuis le seizième siècle, dépeignent les vices, travers et ridicules de la société et des personnages de l'Ancien Régime. (…) Il est difficile de classer ces poésies qui hésitent entre l'obscénité joyeuse et la hantise charnelle, entre le pamphlet agressif et le couplet plaintif, entre l'exercice de style aux prétentions littéraires et la gauloiserie sans orthographe. Notons que le classement opéré par les recueils, en fonction de la nature du texte, ne donne qu'une vision approximative de la réalité. En effet, les feuillets étaient probablement éparpillés, d'une diffusion désordonnée, écrits par différents auteurs, les compilations élaborées pendant l'affaire relèvent d'un travail d'érudit amusé qui nous éloigne quelque peu de l'authenticité du document. (…) Épigramme, rondeau, stance, prière, prophétie, conte, imprécation, épitaphe, conclusion, contre, logement, lettres, anagramme, apostrophe. Cette richesse dans le genre illustre d'une belle façon l'inspiration créatrice suscitée par l'affaire, l'esprit de jeu littéraire et l'intérêt porté à tel ou tel protagoniste. La poésie ici ne réside pas dans la qualité de la rime ou de la métaphore mais se dévoile souvent dans l'excès, dans la surenchère du langage et exprime une soudaine intensité, une émotion. Au-delà de l'affaire du P. Girard et de la demoiselle Cadière, ces documents semblent utiles pour approfondir notre connaissance des mentalités et témoignent de la passion des Français pour les scandales de la vie privée et les procès retentissants qui prendront une place de plus en plus importante dans les gazettes et mémoires judiciaires au fil du siècle . Il ne faut donc rien écarter et se pencher avec attention sur la richesse informative de ces miscellanées. » (Stéphane Lamotte).Bel exemplaire en maroquin rouge relié par Purgold, illustré d’une gravure de l’époque repliée en frontispice, représentant le jésuite Guignard aux Enfers (XVIe siècle) accompagnée de la légende bilingue latin / français : Quoi donc Guignard ici fait les honneurs ? : Tel est l’orgueil de cette race impie / Partout elle aspire aux grandeurs / Et cette illustre compagnie / pour gouverner tout l’univers / Entretient des Sujets même dans les Enfers. Cette gravure parut en 1759 après l'attentat de Damiens contre Louis XV le 5 janvier 1757 (Jaime, Musée de la caricature, 1837, XVIIIe siècle p. 2)Provenance (sans marque explicite) : Henri-Noel-François Huchet (1782-1861), comte de la Bédoyère ; officier supérieur des Gardes du corps des Rois Louis XVIII & Charles X, il accompagna Charles X jusqu’à Cherbourg en 1830 puis donna sa démission immédiatement après cet acte de fidélité à son Roi. Il laisse derrière lui une des plus remarquables bibliothèques de l’époque.Catalogue des livres rares et précieux de la bibliothèque de M. le comte de La B*** (1837), n°706 ; Stéphane Lamotte, Le P. Girard et la Cadière dans la tourmente des pièces satiriques, Dix-huitième siècle, vol. no 39, no. 1, 2007, pp. 431-453 ; Claude Duneton, Histoire de la chanson française, t. I, pp. 614-615.
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