P., Aimé Payen, 1825, 2 vol. in-16, 250 et 249 pp, 3 gravures hors texte (un portrait de l'auteur, Tivoli, le Vésuve), reliures demi-basane havane, dos lisse, fleurons à froid, palettes en queue, pièce de titre et de tomaison basane noire (rel. de l'époque), mque la coiffe sup. du tome 2, bon état
Reference : 108740
Charles Dupaty (1744-1788), avocat général au parlement de Bordeaux, avait pris la défense de La Chalotais ; il se retrouva enfermé au château de Pierre-en-Cise, dont il ne sortit que pour un exil qui dura jusqu'en 1774. A sa parution, littérateurs et philosophes vantaient avec enthousiasme cet ouvrage qui regorgeait d'aperçus ingénieux et de renseignements utiles. Dans un style soigné, Dupaty fait entre autres ici montre de ses préoccupations à l'égard des galériens, des lois ou encore des gouvernements. Homme profondément engagé contre la royauté, taxé d'athéisme (il fit de la prison et le présent ouvrage fut mis à l'index par le Vatican), il plaide ici pour une justice équitable. Mais il n'omet pas non plus – loin s'en faut – de proposer des descriptions pleines de charme des monuments et tableaux de lItalie. — "Les Lumières françaises ont été portées par une multitude d'auteurs bien souvent oubliés au-delà du cercle des spécialistes du XVIIIe siècle. Parmi eux, Charles Marguerite Jean-Baptiste Mercier Dupaty (1746-1788) a pourtant connu sa part de gloire littéraire. A tel point que ses Lettres sur l'Italie eurent l'honneur d'être mises à l'Index par l'Eglise en 1826, près de quarante ans après leur publication. Juriste – il fut président à mortier du Parlement de Bordeaux, une des charges les plus élevées de la magistrature de l'époque – , Dupaty s'est fait un nom comme pourfendeur des insuffisances du système judiciaire de l'époque. Les annales ont retenu son intervention, décisive, en faveur de trois Champenois injustement condamnés au supplice de la roue, et qu'il réussit à faire libérer en 1787 grâce à la rédaction d'un mémoire qu'il sut intelligemment diffuser. Voyager à travers l'Italie et ses petits Etats plus ou moins autonomes sous la double férule, ici des Habsbourg, là des papes, fournit en effet au penseur politique et observateur social l'occasion de multiples réflexions et comparaisons... On apprend ainsi que Monaco était à l'époque une terre désolée. « La misère y est extrême », précise même notre philosophe, qui passe aussi par Gênes, où il s'en va voir les galères. Dupaty nous explique qu'il existe des galériens « volontaires », qui n'ont plus d'autre solution pour vivre que de s'engager à ramer contre rétribution, s'engageant ainsi dans un parcours infernal dont ils ne peuvent que rarement sortir. Toujours à Gênes, il décrit les conditions de détention abominables des Turcs prisonniers et constate, surpris, qu'on leur a tout de même accordé une mosquée alors que les protestants, en France, n'ont toujours pas le droit d'ouvrir des temples. On appréciera l'analyse proposée des successions pontificales, attendues avec impatience par les ambitieux locaux : « Le plus grand tort que les papes puissent avoir avec les Romains, c'est de vivre trop longtemps, de retarder le tirage d'une loterie où tout le monde a des billets, et qui a des lots pour tout le monde. » Il n'est pas non plus inutile de lire les lignes consacrées à la manière dont les Juifs du ghetto de Rome étaient traités à l'époque par l'administration papale, humiliés en permanence et incités en permanence à la conversion. Dupaty a de l'humour, écrit d'une manière alerte et n'hésite jamais devant les effets de style propres à l'époque, ce qui contribue naturellement au charme de ces lettres. (...) Suivant en cela la plupart de ses illustres amis, Dupaty est aussi sans pitié pour la « superstition », c'est-à-dire pour la religion catholique. La simple vue de clercs le rend malade. A Salerne, il les compare à des insectes : « Misérable ville ! Dévorée par des insectes blancs, noirs, gris, rouges, de toutes les couleurs. Toutes les maisons en sont pleines. Le temps viendra où les Italiens, en se décrassant, secoueront aussi cette vermine. »..." (Jérôme Anciberro, Témoignage chrétien, mai 2010)
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