12/04/1920 TRÈS BELLE LETTRE DE PAUL DUKAS SOLLICITÉ PAR LA S.I.M. POUR RÉDIGER UN HOMMAGE À CLAUDE DEBUSSY QUI AVAIT ÉTÉ UN COLLABORATEUR ASSIDU DE LA REVUE INTERNATIONALE DE MUSIQUE : Paul Dukas se souvient fort bien de leur rencontre …aux concerts de la Sorbonne en 1915 (…). La réapparition de la S.I.M. pourra rendre de réels services si, au milieu du chaos et de la cohue où la musique me semble patauger avec le reste, vous donnez le bon coup de barre qui devient indispensable. En attendant tout est confondu, tout est applaudi, tout est admis et au fond tout le monde se fiche de tout (…). LArt est limage de la société ou plutôt de vingt sociétés qui ne coexistent quen sautodétruisant. Il paraît que lensemble forme un art national… Mais cest de lart international quil sagit. Cest peut être pire… Après lavoir longuement félicité de reprendre la publication de la revue, il décline sa proposition dy collaborer : …Depuis longtemps je me suis convaincu quon ne pouvait pas parler de musique. On ne parle que de ses goûts, de ses préférences, (…) ou alors on parle à côté (…). Jai été critique, mais depuis vingt ans je ne le suis plus… Il nécarte pas cependant léventualité dune collaboration occasionnelle, réponse quil a déjà faite …vingt fois à dautres et tout dernièrement encore à André Gide qui me sollicitait pour la Nouvelle Revue Française… Et il ajoute : …Vous êtes historien, vous êtes critique et vous vous étonnez de voir Debussy piétiné par ses successeurs ? Cest très normal et cela fait partie de la gloire. Beethoven, Wagner et Franck ont été piétinés de la sorte (…). Et Debussy lui-même avait prévu le reniement de tous ces petits Saint Pierre qui nattendent même pas le chant du coq [allusion au reniement de Jésus par Pierre]… Au cours de son atroce maladie il mécrivait en me faisant le confident de son angoisse de ne pas venir à bout de la Chute de la Maison Usher… Et il cite de mémoire cette parole de Debussy : …« Je ne voudrais pas être jugé en fin de compte sur le seul Pelléas : le musicien nest pas tendre pour les morts ! » Je lui ai répondu, je crois « Pensez-vous quil le soit pour les vivants ? »… Je ferai de mon mieux pour massocier et de tout cœur à lhommage musical que vous désirez rendre à notre si cher et illustre ami…La publication musicale de la S.I.M. qui consistait en une revue très dense cessa sa parution la veille de la Grande guerre. De nombreux contributeurs y avaient participé, des critiques musicaux ou littéraires, des interprètes ou compositeurs. Deux dentre eux tinrent une chronique régulière : il sagissait dErik Satie qui livrait ses désopilants « Mémoires dun amnésique » et Claude Debussy qui fut un collaborateur régulier et avisé de la revue.Après le succès de Pelléas et Mélisande en 1902, Debussy chercha dans les Nouvelles dEdgar Poe quil admirait, un nouveau sujet dopéra : ce fut La Chute de la Maison Usher. Atteint dun cancer qui le faisait atrocement souffrir, Debussy ne put en terminer lécriture.
Reference : 3440
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